Le cardinal Ouellet condamné pour le renvoi « infamant et vexatoire » d’une religieuse

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Le cardinal canadien Marc Ouellet assiste à une messe du pape en l’honneur de Notre-Dame de Guadalupe, le 12 décembre 2022, à la basilique Saint-Pierre, au Vatican.

Mère Marie Ferréol a été renvoyée abusivement de sa communauté catholique de Pontcallec, près de Vannes, au printemps 2021, « sans avoir commis le moindre délit, sur la base de motifs non établis », et devra recevoir des dommages et intérêts des responsables de ce renvoi « infamant et vexatoire ». La chambre civile du tribunal de Lorient (Morbihan) a condamné, mercredi 3 avril, la communauté des dominicaines du Saint-Esprit à verser à la religieuse 33 622 euros au titre du devoir de secours, ainsi qu’à verser solidairement avec le cardinal canadien Marc Ouellet et les « inspecteurs » mandatés par le Vatican, Jean-Charles Nault, père abbé de l’abbaye de Saint-Wandrille (Seine-Maritime), et Maylis Desjobert, mère abbesse de Notre-Dame de Boulaur (Gers), la somme de 182 400 euros au titre de son préjudice matériel, ainsi que 10 000 euros au titre de son préjudice moral – soit plus de 200 000 euros.

Le 3 août 2023, mère Marie Ferréol, de son vrai nom Sabine Baudin de La Valette, 58 ans, avait assigné le cardinal québécois Marc Ouellet, préfet émérite résidant à Rome, « pour les fautes commises et le préjudice matériel et moral subi ». L’ancien préfet de la congrégation pour les évêques, âgé de 79 ans, avait en effet signé lui-même le décret du renvoi définitif de cette religieuse qui avait passé trente-quatre ans à Pontcallec, communauté traditionaliste qui coiffe plusieurs établissements d’enseignement comme l’école Saint-Pie-X à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine).

C’est à la suite de sa visite que Marie Ferréol avait été « exclaustrée » (exfiltrée) de nuit, en grand secret, sans que sa famille soit prévenue du lieu où elle se trouvait, placée à l’isolement et en pénitence – à l’abbaye de Solesmes (Sarthe). Demande lui avait ensuite été faite de quitter son habit. Au motif de la « confidentialité », la religieuse n’a jamais su de quels faits elle aurait été coupable : dom Nault avait seulement précisé au Monde, qui l’avait rencontré, qu’il ne s’agissait pas d’un problème « sexuel » ou d’une affaire de mœurs. Or, a motivé mercredi le tribunal, « toute personne a droit de connaître la nature précise des faits qui lui sont reprochés avant de se voir notifier une sanction ».

« Réhabilitation morale »

Le Vatican n’avait pas donné suite au « recours » de la dominicaine de Pontcallec lorsqu’elle s’était adressée au pape François. « Il n’a pas été démontré que le décret d’exclaustration signé du cardinal Ouellet (…) aurait reçu une quelconque approbation pontificale », précise le tribunal dans son jugement. Ecrivain et membre de l’Académie française, l’avocat François Sureau s’était indigné, dans une lettre publiée par Le Monde, qu’on ait « transformé le droit canon en chiffon de papier », regrettant que « le principe du contradictoire, auquel s’attachent tous les systèmes de droit civilisé, n’ait simplement pas été respecté ».

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