La Chine de l’intérieur rattrapée par la crise de l’immobilier

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La construction d’appartements a été suspendue après la faillite de certains promoteurs chinois à Xi’an (Shaanxi, Chine), le 18 juillet 2022.

Madame Liu perd patience. La construction de son appartement a déjà plus d’un an de retard. Au milieu d’un immense chantier, mi-septembre, elle scrute son futur chez-elle, à mi-hauteur d’une tour d’une trentaine d’étages, encore en béton brut. « Regardez : il n’y a que deux ouvriers pour un immeuble aussi grand, à croire qu’ils font de la figuration », dit-elle en montrant les silhouettes qui s’activent sur une nacelle suspendue à la façade.

Lorsque, en 2020, Mme Liu (afin de préserver son anonymat, elle n’a pas souhaité donner son prénom) achète sur plan dans cette résidence située à une trentaine de kilomètres du centre de Xi’an, métropole de la province du Shaanxi, au centre de la Chine, pour 1,06 million de yuans (135 000 euros), le marché immobilier se portait bien. Pour elle et son mari, accéder à la propriété était une manière de s’installer dans leur ville d’adoption et d’assurer l’éducation de leurs enfants, grâce aux trois écoles et au collège promis par le promoteur immobilier de cet immense projet, qui devrait compter 17 000 appartements une fois terminé.

Aujourd’hui, la famille, qui espérait emménager cet été, doit non seulement rembourser son emprunt immobilier mais également payer un loyer pour se loger, soit 8 000 yuans de charges au total. « Et il faut ajouter 500 yuans d’essence pour emmener mes fils à l’école », calcule, soucieuse, Mme Liu. Problème : son mari, qui gagnait bien sa vie comme commercial pour des équipements de salle de bains, est lui aussi touché par la crise immobilière : « Aujourd’hui, il gagne à peine 20 000 yuans [2 500 euros, soit trois fois le revenu moyen à Xi’an]. Une fois tout payé, il nous reste à peine de quoi vivre à quatre. L’an prochain, il faudra aussi débourser pour le grand qui rentre au lycée… je ne sais pas comment on va faire », s’inquiète-t-elle.

« C’est pire que pendant la pandémie »

Mois après mois, la crise immobilière s’aggrave en Chine, entraînant dans sa chute la plupart des secteurs de l’économie. En août, les investissements immobiliers ont reculé de 19,1 % sur un an, le dix-huitième mois de baisse consécutif. C’est un des principaux moteurs de l’économie qui s’arrête : jusqu’en 2020, l’immobilier et la construction assuraient environ 25 % de la croissance chinoise. Plus encore si l’on ajoute l’ameublement et les matières premières.

Résultat, malgré l’abandon de la politique zéro Covid en 2022 et la fin des confinements, la reprise, attendue début 2023, n’a pas eu lieu : la croissance s’est limitée à 0,8 % au deuxième trimestre, les exportations baissent, et le taux de chômage des jeunes est désormais tenu secret après avoir atteint un record, en juin, à 21,3 %.

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