dans le quartier de l’Alma-Gare à Roubaix, un chantier sous haute tension

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D’abord, ils ont aperçu deux drones patrouiller au-dessus de leurs têtes. Puis, ils ont regardé des ouvriers ériger des murs de béton hauts de 2,50 mètres autour de plusieurs immeubles. Enfin, ils ont vu débarquer des cars de CRS à chaque coin de rue. Pour les habitants du quartier populaire de l’Alma-Gare, à Roubaix (Nord), le chantier de rénovation urbaine démarre sous très haute tension.

Ces mesures de sécurisation drastiques ont été décidées mi-novembre tantôt par le préfet de région, tantôt par le maire, le bailleur social et le maître d’œuvre, à la suite d’insultes, de menaces et de jets de galets émanant de jeunes du quartier en direction des salariés de l’entreprise qui réalisent les travaux. Dans la nuit du 28 au 29 novembre, une pelleteuse a été incendiée.

Ces incidents interviennent dans un climat dégradé depuis des mois. Manque d’informations, non-concertation, démolitions… Certains habitants s’opposent à un projet qu’ils jugent « désastreux » et « invraisemblable » compte tenu de l’architecture et de l’histoire de ce quartier, étudié dans les écoles d’urbanisme et symbole, dans les années 1970 et 1980, d’une participation citoyenne inédite et exemplaire.

Projet « humainement indigne »

D’abord, ils ont vu une famille partir, puis deux, puis trois. Puis, ils ont observé un premier immeuble se vider, et un second. Enfin, ils ont vu les camions de chantier arriver. « On n’a rien compris, on n’y croyait pas, la rénovation urbaine, on en parle depuis tellement longtemps, mais personne ne nous a véritablement dit que le projet était validé et que les travaux allaient démarrer », raconte Florian Vertriest qui dénonce un projet « humainement indigne », car conçu et décidé « sans ses habitants », « sans aucune concertation ». A 29 ans, le coach sportif a habité toute sa vie à l’Alma. En août 2022, il a fondé le collectif Non à la démolition dans le quartier de l’Alma-Gare. « Mur de la honte », « Non à la démolition, oui à la rénovation », peut-on lire sur les affiches jaunes collées sur les palissades de béton.

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Comme à l’Alma, un peu partout en France – Tours, Grenoble, Toulouse, Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), Amiens, Plaisir (Yvelines), Montreuil (Seine-Saint-Denis)… –, des collectifs d’habitants s’érigent contre les projets de rénovation urbaine dont ils estiment avoir été écartés. Un thème au cœur du nouveau long métrage du réalisateur Ladj Ly, Bâtiment 5.

Florian Vertriest, à la tête du collectif « Non à la démolition dans le quartier de l’Alma-Gare », à Roubaix (Nord), le 5 décembre 2023.
Une affiche « NON à la démolition, OUI à la rénovation » sur le mur de béton érigé autour d’un îlot de bâtiments pour protéger l’avancée des travaux de démolition dans le quartier de l’Alma, à Roubaix (Nord), le 5 décembre 2023.

« On déplace des populations vers des périphéries en espérant faire venir d’autres populations moins précaires ; on leur dit “on va rénover votre quartier, qui en a bien besoin, mais ce sera sans vous parce que vous allez partir”, c’est absurde », dénonce François Piquemal, député La France insoumise de Haute-Garonne, auteur d’un rapport publié en juin, « Allô ANRU ».

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