Au Canada, les « kits de suicide » de Kenneth Law comme des lettres à la poste

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Kenneth Law aurait envoyé plus de 1 200 colis à travers le monde (ici, une conférence de presse de la police régionale de York, le 29 août 2023).

Une substance chimique mortelle, mais légale, envoyée banalement par la poste dans plus de quarante pays. Des dizaines, peut-être des centaines de destinataires à travers le monde ayant utilisé ce poison pour s’ôter la vie. Au dos du colis, pas de nom mais une même adresse d’expédition : une boîte postale domiciliée à Mississauga, une ville canadienne de près de neuf cent mille habitants adossée à Toronto, la capitale de l’Ontario. Depuis cinq mois, le Canada vit au rythme de l’enquête, tentaculaire, déclenchée sur plusieurs continents, destinée à établir le nombre exact de victimes de son présumé « serial killer par voie postale ».

Soupçonné d’être au cœur de cet empoisonnement consenti à l’échelle planétaire, Kenneth Law, 57 ans, a été arrêté par la police régionale de Mississauga le 2 mai 2023. Il a été inculpé pour avoir prodigué un « conseil ou une aide au suicide » à deux personnes en Ontario, un crime passible de quatorze ans de prison selon la législation canadienne. Depuis l’été, douze autres victimes présumées, âgées de 16 à 36 ans, sont venues alourdir son dossier d’accusation au Canada.

Aux Etats-Unis, en Italie, en Nouvelle-Zélande, en Australie et en Irlande, les services de police remontent également la piste de tous les suicides qui, dans chacun de leur pays, pourraient être liés à Kenneth Law. Au Royaume-Uni, la National Crime Agency a déclaré en août avoir identifié deux cent trente-deux personnes ayant reçu des produits vendus par l’individu au cours des deux dernières années. Quatre-vingt-huit sont décédées.

Additif dans la conservation des viandes

Les enquêteurs de l’Ontario soupçonnent ce Canadien d’avoir expédié plus de mille deux cents colis de sachets de nitrite de sodium à travers le monde. Cette poudre cristalline blanche, utilisée comme additif dans la conservation des viandes et des charcuteries sous le code E250, s’avère être un poison redoutablement efficace si elle est ingérée à haute dose.

En réduisant les niveaux d’oxygène et en altérant la respiration, il peut rapidement entraîner la mort. Depuis 2021, plusieurs équipes de toxicologues américains, britanniques et italiens ont publié des études montrant que l’ingestion de nitrite de sodium devenait une méthode de suicide de plus en plus répandue, notamment auprès des 15-39 ans qui utilisent Internet comme principale source d’information.

Sur son profil LinkedIn toujours actif, Kenneth Law, petites lunettes rondes, se présente comme « cadre de direction », détenteur d’un diplôme d’ingénieur et d’un MBA en marketing et « business international ». Il fait l’impasse sur ses dernières expériences professionnelles : un bref passage comme cuisinier dans un hôtel de luxe de Toronto, où il aurait découvert, selon la police, ce « sel alimentaire », et la commercialisation de celui-ci.

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