à Quiberon, la crise du logement nourrit un vote de « colère »

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Le soleil vient enfin de se lever, et le parking accolé à l’église du cœur de Saint-Pierre-Quiberon (Morbihan), à quelques pas du port, commence à se remplir. Parmi les automobilistes, une Quiberonnaise d’origine, fine doudoune orange et longs cheveux cendrés. Elle revient volontiers sur les résultats des élections européennes du 9 juin, qui ont placé la liste du Rassemblement national (RN) de Jordan Bardella largement en tête sur la presqu’île. « Je m’en réjouis, lance la quinquagénaire, qui souhaite conserver l’anonymat et se faire appeler Cheyenne. La raison ? Le trop-plein d’immigrés, qui ont tout, il n’y a plus rien pour nous. Et bien sûr les problèmes de logement et le prix de l’essence. » Cheyenne a vendu, il y a cinq ans, son appartement dans une maison de famille de Quiberon et est partie vivre dans l’arrière-pays, à une heure de là, à Saint-Jean-Brévelay. « Mon but c’est de revenir à Quiberon, mais c’est compliqué pour l’instant vu les prix, j’attends de trouver le logement idéal », dit-elle.

Lire le reportage (2022) : Article réservé à nos abonnés En Bretagne, « c’est devenu impossible de se loger, on nous pousse dehors »

Dans la commune de Quiberon, le RN a obtenu 30,4 % des voix, et à Saint-Pierre-Quiberon, en entrée de la presqu’île, 28,3 %. De quoi provoquer surprise et incompréhension parmi les équipes municipales. « Ce n’est pas lié à une situation interne à Quiberon, ici il n’y a pas d’insécurité, de stress quotidien. Nous sommes sur un territoire à bonheur. On est très chanceux », estime Gildas Quendo, premier adjoint (sans étiquette) de la mairie de Quiberon.

Les difficultés d’accès au logement peuvent-elles être un des moteurs du vote en faveur de l’extrême droite en Bretagne, et notamment sur le littoral, où la masse des résidences secondaires a créé une pénurie et fait monter les prix de l’immobilier ? C’est une évidence pour Fanny Chappé, maire (divers gauche) de Paimpol (Côtes-d’Armor) et conseillère régionale de Bretagne chargée du logement. « C’était écrit, on ne peut pas se loger chez nous, cela génère de la colère, et la colère se traduit souvent par un vote RN », affirme-t-elle.

Nil Caouissin, élu Union démocratique bretonne (parti breton classé à gauche) au conseil régional de Bretagne, note que « le logement a été très peu présent dans la campagne et dans les programmes ». « Pourtant, le sujet crée du ressentiment dans la population, ajoute-t-il. Les gens ont l’impression de ne plus pouvoir vivre chez eux, et la tension immobilière se diffuse dans les terres. Il y a une très forte déconnexion entre la population et les élus sur le sujet. »

7 200 habitants, 70 000 en été

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