Yahya Sinouar, l’insaisissable chef du Hamas

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L’armée de l’Etat hébreu affirme que cet homme filmé dans un tunnel de la bande de Gaza, le 10 octobre 2023, est Yahya Sinouar, le chef du Hamas. L’image est tirée d’une vidéo diffusée par les forces israéliennes, le 13 février 2024.

En octobre 2023, Yahya Sinouar n’avait plus longtemps à vivre. « Dead man walking », le chef du Hamas n’était qu’un mort qui marche, affirmaient, en anglais, Benyamin Nétanyahou, le premier ministre israélien, et l’armée. Il paierait pour avoir orchestré le plus grand massacre de civils de l’histoire d’Israël, le 7 octobre. Or, depuis huit mois, l’Etat hébreu a détruit l’enclave et l’essentiel des structures militaires et de gouvernement du Hamas, mais il échoue à tuer ou à capturer M. Sinouar.

Pis, l’homme impose encore ses termes dans les négociations en faveur d’un cessez-le-feu, qui devaient reprendre une nouvelle fois la dernière semaine de mai. Il exige qu’Israël annonce la fin de sa guerre et des garanties internationales lui assurant que l’armée se retire de l’enclave. Sans son accord, aucun « deal » n’est possible : la direction en exil du mouvement n’accepte rien sans son feu vert.

Peu après le 7 octobre, une caméra de sécurité du Hamas avait enregistré la silhouette de Yahya Sinouar au fond d’un tunnel. Du moins Israël l’affirme et ce fantôme lui ressemble : même corps rabougri en fil de fer, même profil découpé à la serpe, même démarche tranquille. L’homme, âgé de 62 ans, s’enfonçait dans les profondeurs de l’enclave, tenant par la main l’un de ses enfants, selon le renseignement israélien, derrière son épouse et son frère cadet, Mohammed, haut dirigeant des Brigades Al-Qassam, la branche armée du mouvement.

« Ce nain arrogant »

« Savez-vous qui je suis ? » Durant ces premiers jours de la guerre, les bombes israéliennes pleuvent sur Khan Younès (Sud), et Yahya Sinouar se plante devant un groupe d’otages israéliens, dans un tunnel. Parmi eux, Margalit Moses, institutrice à la retraite, capturée au kibboutz de Nir Oz et emportée vers la ville natale du chef du Hamas. Elle entend Yahya Sinouar, « ce nain arrogant », leur promettre qu’ils seraient bientôt libérés, en échange de prisonniers palestiniens. Elle a eu cette chance, à l’occasion d’une courte trêve, en novembre 2023, et a raconté alors son histoire à la presse. D’autres parmi ses voisins demeurent à Gaza ou y sont morts.

Entre janvier et avril, l’armée a prétendu que Yahya Sinouar était aux abois, traqué par ses commandos à Khan Younès. En février, un officier au visage flouté montrait devant une caméra la cache que Yahya Sinouar aurait quittée précipitamment, la cuisine où ses aides le nourrissaient, ses toilettes et les matelas de ses gardes, de lourdes liasses de billets tirées de son coffre-fort.

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