Vienne, la renaissance d’une ville tournée vers l’Est

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De son bureau, au douzième étage du vaste et moderne siège de Siemens, en plein cœur d’un faubourg industriel de Vienne, Patricia Neumann peut contempler l’ampleur des changements qu’a vécus sa ville natale ces vingt dernières années. « C’est massif surtout quand on pense aux blessures de l’après-guerre », estime cette figure du patronat viennois, 53 ans, qui a pris en 2023 la tête de la filiale autrichienne de l’entreprise allemande après des années à diriger celle d’IBM. Pour cette proeuropéenne convaincue, pas de doute, « nous avons profité profondément de l’élargissement » de 2004, lorsque huit pays ex-communistes, dont quatre directement voisins de l’Autriche (République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Slovénie), ont rejoint l’Union européenne (UE).

Avec son look futuriste, le campus Siemens City est un parfait exemple de cette renaissance de l’ancienne capitale des Habsbourg survenue à la faveur des différentes vagues d’extension de l’UE vers l’Est opérées jusqu’en 2013. Ils ont subitement replacé la belle endormie des bords du Danube au centre de la carte du Vieux Continent. Inauguré en 2010, le campus de Siemens a d’ailleurs parfaitement rempli son objectif : faire de Vienne la tête de pont du conglomérat allemand pour conquérir les nouveaux marchés de cette « nouvelle Europe » dont les frontières commencent en Hongrie, à 70 kilomètres à l’est de Vienne.

Dans deux ailes de bureaux aérés entourant une « allée » agrémentée d’un café et d’alcôves destinées aux réunions, des ingénieurs et cadres administratifs « de trente-sept nationalités différentes » supervisent l’activité de « 33 000 salariés » dans une zone géographique qui s’étend jusqu’en Asie centrale. « C’était logique d’établir notre centrale pour ces pays ici, les Autrichiens ont la même mentalité que les gens de l’Est depuis l’Empire austro-hongrois », sourit, en faisant la visite des lieux, Johann Schindler, vétéran du service de communication de l’entreprise.

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Economiste à l’Institut de Vienne pour les études économiques internationales, Michael Landesmann formule cela un peu plus scientifiquement : « Alors que nous étions un petit pays avec des entreprises moyennement compétitives, très dépendantes de l’Allemagne, l’élargissement nous a permis d’accéder à un marché plus grand au côté de pays à l’économie encore plus faible », avance-t-il, au sujet de cet énorme « avantage compétitif » dont a subitement bénéficié l’économie autrichienne. En 2020, l’institut Wifo avait estimé que le produit intérieur brut de ce pays d’environ neuf millions d’habitants était de 15 % supérieur à celui qu’il aurait été sans adhésion à l’UE.

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