Un seul et même territoire palestinien occupé

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Après une frappe israélienne sur un immeuble d’habitation, à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza, le 16 août 2024.

La paix peut parfois se jouer au Moyen-Orient sur un article, voire sur un singulier plutôt qu’un pluriel. L’Etat d’Israël, qui s’était établi en 1948 sur 77 % du territoire de la Palestine (jusque-là sous mandat britannique), s’empare en 1967 des 23 % restants, soit Jérusalem-Est, la Cisjordanie et la bande de Gaza. Cette guerre des Six-Jours permet aussi à l’Etat hébreu d’occuper la péninsule égyptienne du Sinaï et le plateau syrien du Golan. De laborieuses tractations au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies (ONU) conduisent à l’adoption de la résolution 242, qui proclame « l’inadmissibilité de l’acquisition de territoires par la guerre ».

Mais les deux versions du texte, française et anglaise, pourtant de même valeur juridique, divergent quant à l’obligation d’un « retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés lors du récent conflit », en français, ou « de territoires occupés » (« from territories occupied »), en anglais. C’est finalement la seule version anglaise qui s’impose, du fait de la prééminence des Etats-Unis au Moyen-Orient.

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L’enjeu d’un article ou d’un singulier

L’omission d’un simple article va avoir des conséquences considérables, puisqu’elle justifiera le retrait partiel et négocié de la part d’Israël, sous l’égide de Washington, « de territoires occupés », en lieu et place de l’exigence de l’évacuation de tous les territoires conquis par les armes. C’est le fameux principe de « la terre contre la paix » dont découlent les traités de paix signés par Israël avec l’Egypte, en 1979, puis avec la Jordanie, quinze ans plus tard. En revanche, les accords israélo-palestiniens sont conclus, de 1993 à 1995, sur la base de la reconnaissance d’Israël par l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), mais sans qu’Israël s’engage en retour à évacuer les territoires palestiniens occupés en 1967.

Les gouvernements israéliens successifs se sont, au contraire, employés à saper toute affirmation de souveraineté palestinienne, se contentant de déléguer des pouvoirs limités à l’Autorité palestinienne (AP) établie au fil des retraits progressifs et partiels de l’armée israélienne. Israël a pu consolider sa domination par une gestion différenciée « des » territoires palestiniens : Jérusalem-Est a été annexée de fait dès 1967, officiellement en 1980 ; l’AP n’est parvenue à gérer qu’une partie de la Cisjordanie, où la colonisation israélienne s’est poursuivie, puis intensifiée ; la bande de Gaza, évacuée unilatéralement en 2005, a été placée sous blocus deux ans plus tard, en réaction à sa prise de contrôle par le Hamas.

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