Pas un politique ne manque à l’appel pour dénoncer le projet de cession partielle par Sanofi de sa filiale qui « produit » le Doliprane. Est-ce pourtant le bon exemple pour illustrer une politique de réindustrialisation et de sécurité sanitaire ? A l’évidence non, et ce, pour plusieurs raisons. Le risque de pénurie existe pour certains médicaments, notamment les anti-infectieux et les médicaments du système nerveux, mais pas pour le paracétamol.
Ainsi, la construction de deux nouvelles usines, l’une par Seqens, qui produira 15 000 tonnes de paracétamol qui seront disponibles sur le marché, dès 2026, et l’autre par Ipsophène, à Toulouse, qui produira 4 000 tonnes par an, soit, au total, deux fois et demie la consommation européenne. Si inquiétude il doit y avoir, elle est plutôt du côté des capacités du marché européen et mondial à absorber une telle production dans l’avenir.
Les difficultés d’approvisionnement peuvent exister, mais elles sont liées à notre dépendance vis-à-vis du principe actif nécessaire à la fabrication du paracétamol. Ce principe actif était produit en France jusqu’en 2008, date à laquelle Rhodia s’est délocalisé en Chine. Les rachats successifs ont paradoxalement conduit une entreprise française, précisément Seqens, à devenir un des premiers producteurs de paraminophénol (PAP), sur le territoire chinois, le principe actif indispensable à la fabrication du paracétamol, mais dont la mise à disposition de la production peut être affectée par des restrictions chinoises aux exportations.
Absence de politique européenne du médicament
Ne s’intéresser qu’à la dernière étape de la chaîne de fabrication revient à s’assurer de notre approvisionnement en chips en construisant des usines pour les fabriquer sans produire de pommes de terre. Les vraies questions ne sont pas posées. La première est celle de la consommation de paracétamol par les Français. Nous en sommes les premiers consommateurs en Europe avec une transformation de notre utilisation vers les dosages les plus forts sans aucune justification (+ 140 % sur la même période de dix ans pour le dosage à 1 000 milligrammes).
Contrairement à ce qui est couramment affirmé, nous n’avons jamais connu de pénurie réelle, les difficultés d’approvisionnement au début de l’épidémie due au Covid-19 étaient liées au stockage de précaution de nos compatriotes. Ces difficultés ont d’ailleurs été résolues en quelques semaines avec deux mesures simples, l’interdiction de vente en ligne et la limitation du nombre de boîtes délivrées en officine.
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