Tollé au Maroc après que Benyamin Nétanyahou a présenté sur LCI une carte du royaume sans le Sahara occidental

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« Une erreur. » C’est en ces termes que le ministère israélien des affaires étrangères a justifié la présentation par Benyamin Nétanyahou, lors de son interview sur LCI jeudi 30 mai, d’une carte du Maroc sans le Sahara occidental, « un territoire non autonome », selon les Nations unies, mais que Rabat considère comme relevant de sa souveraineté.

Face au tollé soulevé dans la presse marocaine et sur les réseaux sociaux, le porte-parole du ministère pour les médias arabes s’est livré à un exercice inhabituel de contrition. Sur le réseau social X, Hassan Kaabia s’est adressé directement au roi Mohammed VI : « Nous nous excusons pour cette erreur technique. »

Au cours de son entretien, M. Nétanyahou a cité le Maroc comme étant l’un « des nombreux pays du monde arabe » avec lesquels Israël « a fait la paix », en référence aux accords d’Abraham et à la reprise officielle, en décembre 2020, des relations entre Rabat et Tel-Aviv. Mais à l’appui de sa démonstration, le premier ministre israélien a brandi une carte, sur laquelle le royaume chérifien apparaissait en vert et le Sahara occidental en blanc.

Les critiques côté marocain ne se sont pas fait attendre. Le site d’informations Médias24 a qualifié le geste d’« acte indécent ». « Faudrait-il voir dans cette carte une provocation ? », s’est interrogé de son côté le magazine Telquel, tandis que le quotidien du parti de l’Istiqlal, L’Opinion, a dénoncé « une attaque contre le Maroc suite à sa condamnation des agressions contre la Palestine ».

Une carte du Maroc « sans son Sahara »

Rabat, qui refuse toujours de ratifier le statut de Rome instituant la Cour pénale internationale, n’a pas réagi publiquement à la requête de son procureur général, qui avait demandé, le 20 mai, l’émission de mandats d’arrêt contre Benyamin Nétanyahou et son ministre de la défense. Mais la diplomatie marocaine a cependant salué la décision de la Cour internationale de justice, qui avait enjoint à Israël, le 26 janvier, de prendre « toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l’incitation directe et publique à commettre le génocide ».

En juillet 2023, dans une lettre adressée au roi Mohammed VI, le premier ministre israélien avait reconnu la souveraineté du Maroc au Sahara occidental. Mais un premier couac avait eu lieu dès octobre, après qu’une photographie de son bureau avait montré une carte du Maroc « sans son Sahara », selon les journaux marocains.

Le cabinet de M. Nétanyahou avait alors assuré qu’il s’agissait d’une carte « ancienne » et qu’elle était en cours de remplacement. La diplomatie israélienne avait, déjà, été contrainte de s’expliquer publiquement, ce qui rend son embarras, depuis jeudi soir, après ce second couac, plus évident.

« M. Nétanyahou s’est immédiatement rendu compte que la carte était fausse et qu’elle ne correspondait pas aux cartes officielles qu’utilise le gouvernement israélien », soutient Asher Fredman, directeur pour Israël de l’Institut des accords d’Abraham pour la paix, l’organisme chargé d’apprécier l’évolution des traités de normalisation entre l’Etat hébreu et les pays arabes.

« Effritement » de la normalisation

Aussi involontaire soit-elle, la fausse note de Benyamin Nétanyahou intervient alors que les observateurs de la relation bilatérale font remarquer « l’effritement » de la normalisation entre le Maroc et Israël. Les signaux faibles se multiplient depuis l’attaque du Hamas, le 7 octobre, et le siège de Gaza par l’armée israélienne.

La diplomatie parlementaire est au point mort, les rencontres gouvernementales ont cessé et les vols directs entre les deux pays restent suspendus. Quant à la perspective d’un consulat israélien à Dakhla, l’une des principales villes du Sahara occidental, dont M. Nétanyahou avait indiqué, à l’été 2023, examiner « positivement » l’ouverture, elle n’a jamais paru aussi lointaine.

Les échanges économiques se poursuivent néanmoins, sans publicité cette fois, tout comme la coopération militaire, qui constitue le cœur du rapprochement entre Rabat et Tel-Aviv. Sur ce point, les deux capitales convergent dans leur analyse de la situation au Sahara occidental. « La souveraineté du Maroc [sur ce territoire] relève de la sécurité tant d’Israël que du Maroc. Nous devons repousser les activités déstabilisatrices du Front Polisario, qui est armé et financé par l’Iran », insiste David Aaronson, le directeur adjoint de l’Institut des accords d’Abraham pour la paix.

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Rabat, qui considère que les indépendantistes sahraouis sont soutenus par Téhéran et qu’ils participent aux actions des groupes terroristes au Sahel, pointait récemment leurs liens avec les mercenaires russes basés en Afrique de l’Ouest. La presse marocaine rapportait, il y a une semaine, le recrutement de quelque 500 jeunes, issus des camps sahraouis proches de Tindouf, au sein du dispositif paramilitaire mis en place par Moscou au Mali.

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