« Sur l’Ukraine, les zigzags d’Emmanuel Macron perdent les Français et nos alliés »

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François Ruffin, lors d’une manifestation pour la Journée internationale des droits des femmes, à Paris, le 8 mars 2024.

François Ruffin, qui se prépare pour l’élection présidentielle de 2027, esquisse un délicat pas de deux avec les prises de position de Jean-Luc Mélenchon. Il prône à la fois le réarmement de l’Ukraine et de l’Europe, mais n’exclut pas une révision de ses frontières dans la perspective d’une négociation avec Vladimir Poutine.

Emmanuel Macron juge qu’avoir voté non à l’accord bilatéral de sécurité avec l’Ukraine, comme vous l’avez fait, mardi 12 mars, à l’Assemblée nationale, c’est « choisir la défaite » face à la Russie. Que répondez-vous ?

Nous n’avons pas de leçons à recevoir d’un homme qui a accueilli Vladimir Poutine à Versailles et au fort de Brégançon, alors que la Crimée était déjà envahie, Anna Politkovskaïa et d’autres opposants assassinés. Les zigzags d’Emmanuel Macron – de « ne pas humilier la Russie » à « nous n’avons pas de limite » –, ces revirements ne perdent pas seulement les Français, mais aussi nos alliés.

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A l’inverse, il y a notre constance. Depuis deux ans, toute la gauche vote « oui » au Parlement européen, à l’Assemblée nationale, sur tous les textes qui sanctionnent la Russie, sur tous les envois d’aide militaire et civile à l’Ukraine. Mais dans l’accord, l’OTAN est mentionnée à onze reprises et la perspective de l’adhésion de l’Ukraine à l’Alliance est très appuyée. Or, dans son discours à l’Assemblée mardi, Gabriel Attal, comme Emmanuel Macron jeudi soir, le passent sous silence. C’est du mensonge par omission. Car non, l’OTAN, au cours des deux dernières décennies, du Kosovo à la Libye, n’a pas été « un facteur de stabilité » dans le monde.

Faut-il selon vous sortir de l’OTAN, comme le préconise La France insoumise ? Ou faire en sorte que l’Ukraine n’y entre pas ?

On ne remet pas en cause les accords de sécurité militaire en plein conflit. Quel est le vrai sujet ? Un contraste me frappe entre la situation sur le front, que tous les diplomates disent « enlisée », « gelée », et l’embrasement dans les discours. C’est que l’inquiétude gagne. Pourquoi ? Parce que se profile, peut-être, un retour à la Maison Blanche de Donald Trump. Parce que, de toute façon, les Etats-Unis se tournent davantage vers le Pacifique.

Dès lors, leur mise en retrait, sinon leur abandon, est annoncée. N’agitons pas des fantasmes : les chars russes ne parviennent pas à Kiev, nous ne les verrons pas à Strasbourg ou à Paris. En revanche, en Pologne, en Lettonie, dans ces « terres de sang » si souvent envahies par l’immense voisin, on comprend qu’il y ait davantage d’angoisse. Jusqu’alors, ces pays de l’Est, atlantistes, se réfugiaient sous le parapluie de l’OTAN. Désormais, le doute s’installe et émerge l’idée que « construire notre propre parapluie ne serait pas mal »…

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