Sur l’égalité femmes-hommes au travail, des entreprises à la traîne et un recul du gouvernement

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Noter les entreprises sur leur respect de la parité entre les femmes et les hommes, c’était l’idée de l’index de l’égalité professionnelle créé en 2018. Le gouvernement espérait lutter contre les discriminations, alors que les femmes gagnent toujours en moyenne 15 % de moins que les hommes à temps de travail égal. « On va être vigoureux et intransigeants », assurait alors la ministre du travail, Muriel Pénicaud.

Six ans plus tard, le système de notation a bien vu le jour, mais sa mise en application a été beaucoup moins volontariste qu’annoncé. Alors que des milliers d’entreprises ne remplissent pas leurs obligations déclaratives ou qu’elles font part d’inégalités flagrantes entre leurs salariés et salariées, les sanctions sont quasi inexistantes, selon l’enquête du Monde.

Un abandon du « name and shame »

Promesse d’Emmanuel Macron en 2017, l’index de l’égalité professionnelle repose sur la philosophie du « name and shame » : « nommer et couvrir de honte » les entreprises inégalitaires et les distinguer des plus vertueuses. Ces informations étant rendues publiques, les femmes pourraient consulter les notes des entreprises avant d’y postuler.

Le gouvernement a suivi cette logique au départ, en publiant en 2020 une liste de « mauvais élèves » de l’égalité salariale. Mais, depuis, plus rien, ou presque. Les index sont toujours rendus publics chaque année sur le site du ministère du travail, mais aucune liste agrégée ne permet de savoir lesquelles ne s’y seraient pas conformées ou pénaliseraient les femmes.

Plus d’une entreprise sur cinq en défaut

Or, d’après les données obtenues et agrégées par Le Monde, l’index reste ignoré par des milliers d’entreprises en France. Un cinquième (21 %) des entreprises assujetties n’ont pas mis en ligne leur bilan de l’égalité professionnelle pour l’année 2023, alors qu’elles avaient jusqu’au 1er mars 2024 pour le faire. Et 3 110 entreprises (7 % du total), n’ont jamais publié un seul bilan.

Si la plupart des non-déclarations concernent de petites entreprises, certains grands groupes continuent de traîner des pieds. C’est le cas de l’éditeur Webedia (AlloCiné, Jeuxvideo.com, Puremédias, etc.), qui n’a mis en ligne son premier index que quelques heures après avoir été sollicité par Le Monde.

Pas moins de 106 autres grandes entreprises (plus de 250 salariés) n’ont jamais respecté cette obligation déclarative depuis 2019. Ce sont par exemple l’entreprise de soutien scolaire Domicours individuel, la société France Restauration rapide (qui détient les boulangeries Patàpain) ou la chaîne d’épicerie asiatique Tang Frères. Si les deux premières n’ont pas donné suite, la troisième reconnaît n’avoir « pas bien travaillé pour répondre à cet index tel qu’il est exigé », tout en assurant qu’il n’y a « pas de souci sur l’égalité femmes-hommes » dans l’entreprise. Christophe Polini, le secrétaire général de la société, affirme n’avoir « jamais » été sollicité ou mis en demeure par les services du ministère du travail sur cette question et déplore que cette nouvelle obligation déclarative s’ajoute à « une somme déjà phénoménale de contraintes pour les entreprises ».

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