Les faux-semblants de la baisse historique de la population parisienne

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Paris comptait 2 206 000 habitants en 2015 ; seulement 2 133 111 en 2021. Pour une ville (et sa région) habituée aux records de natalité, cette perte de 73 000 Parisiens en six ans est historique. Le mouvement a débuté en 2010, mais le rythme a doublé au cours de la dernière décennie. Le phénomène a beau être national, les commentaires ont fusé.

« Les Parisiens fuient Paris », « Paris n’attire plus », titraient des articles de presse. Quant aux élus de droite opposés à la maire de Paris, Rachida Dati en tête, ils ont trouvé là un nouvel argument anti-Anne Hidalgo, même si le 7e arrondissement, dont la ministre de la culture est maire depuis 2008, est celui qui, en proportion, se dépeuple le plus.

La chute spectaculaire de la natalité est une première explication de ce retournement de tendance. En 2022, 32 000 enfants naissaient dans la capitale. Ils n’étaient plus que 22 000 en 2023. Le phénomène s’est accéléré depuis l’épidémie de Covid-19 (− 18 % entre 2020 et 2023). « On ne sait pas encore si c’est un report, si ces enfants naîtront plus tard, ou si c’est un choix », détaille Noémie De Andrade, démographe à l’Institut Paris Région.

Mais ceux qui voient là le résultat d’un exode post-Covid-19 se trompent. Les départs ont certes augmenté après le confinement, mais, depuis, leur nombre est redevenu stable, précisent Sandra Roger et Emilie Moreau, respectivement statisticienne et directrice d’études à l’Atelier parisien d’urbanisme. Les arrivées, en revanche, ne se font plus, ce qui fournit une autre partie de l’explication.

Flambée des locations saisonnières

« Les éléments démographiques d’une ville sont très liés au marché immobilier, pour le meilleur et pour le pire », explique Emmanuel Grégoire, premier adjoint d’Anne Hidalgo, chargé de l’urbanisme. La structure du parc locatif privé y est pour beaucoup. Dans les années 1920 et les années 1950, trois millions de Parisiens s’entassaient dans des appartements insalubres et précaires. Depuis, les logements ont été rénovés, transformés.

Mais c’est le parc privé qui accueille la moitié des personnes qui déménagent, comme les trois quarts des arrivées de l’étranger (40 % étant des expatriés). Or, avec la flambée des locations saisonnières et des résidences secondaires, il joue de moins en moins son rôle d’accueil. La ville a beau produire des logements (32 000 en six ans), les plates-formes en détournent des milliers de leur usage traditionnel (16 000 sur la même période).

La surface des logements explique aussi le départ des familles, phénomène qui « n’a rien de nouveau », précise Martin Omhovère, urbaniste à l’Institut Paris Région. La moitié du parc étant constituée de studios et de deux-pièces, « Paris a fondamentalement vocation à accueillir des jeunes ou des ménages qui se mettent en couple puis partent quand les enfants arrivent ». Le phénomène est vrai dans les autres métropoles comme Lyon.

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