Le soutien très opportuniste de l’extrême droite européenne aux agriculteurs

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Le 1er février, alors que des milliers de tracteurs bloquent Bruxelles et que les agriculteurs allument des feux face au siège du Parlement européen, un panneau attire l’attention. « Linkse ratten rol uw matten ! », y est-il écrit en lettres rouges sur fond noir. Ce vieux slogan, que l’on peut traduire par « rats de gauche, cassez-vous ! », est celui des milices flamandes les plus extrémistes, repris par le parti d’extrême droite Vlaams Belang. On remarque d’ailleurs aussi, dans la foule des participants, de nombreuses bannières jaunes frappées d’un lion noir, langue et griffes noires, symbole du mouvement flamingant.

Tentative de récupération ? A l’évidence. Et plutôt réussie, à en croire les témoignages de paysans flamands, très jeunes souvent, hostiles au gouvernement régional, qui entend réduire le nombre d’exploitations et faire respecter des normes environnementales plus strictes. Aux Pays-Bas voisins, le parti agrarien BoerBurgerBeweging, adepte du « bon sens », europhobe et anti-immigration, désormais candidat au pouvoir au côté du populiste Geert Wilders, a aussi bâti son succès sur le refus du plan de limitation des émissions d’azote élaboré par le gouvernement de Mark Rutte.

En Allemagne, l’AfD a infiltré le mouvement de protestation à la suite de la réforme envisagée du diesel agricole. Le parti Droit et justice en Pologne, Vox en Espagne, des groupes extrémistes naissants en Irlande ou le Rassemblement national en France ont aussi manifesté leur soutien présumé indéfectible au mouvement. En Italie, la situation était paradoxale : des agriculteurs revendiquant leur apolitisme ont débordé le très souverainiste et très puissant syndicat Coldiretti, qui était présent en masse à la manifestation de Bruxelles. Deux partis se disputent les faveurs de cette organisation : la Ligue de Matteo Salvini et les Fratelli d’Italia de la présidente du conseil, Giorgia Meloni.

Dénonciation de la PAC

Derrière l’empressement des extrêmes droites à soutenir la révolte, il y a bien sûr la tentative, parfaitement illustrée par Jordan Bardella, de lancer la campagne des élections européennes de juin avec des thèmes porteurs à ses yeux. Classiques, comme la dénonciation de la bureaucratie bruxelloise, autrice d’une politique agricole commune (PAC) réduite à ses seules carences, ou l’attaque en règle contre les « élites » qui ignoreraient ou mépriseraient le peuple laborieux. Plus neuves sont, en revanche, les critiques portées contre l’« écologie punitive » du Pacte vert.

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