« Le principal obstacle à un éventuel rapprochement entre Pékin et Taipei est le régime chinois lui-même »

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Pour la troisième fois de suite, le parti indépendantiste est sorti vainqueur de l’élection présidentielle à Taïwan. En dépit de ses limites, notamment l’absence de majorité au sein de l’Assemblée nationale de la République de Chine [le nom officiel du pays], cette victoire constitue, pour Pékin, un camouflet. Un de plus. L’élection, bien organisée, calme, parfaitement transparente, constitue un défi idéologique direct pour le régime chinois.

Alors que le Parti communiste chinois, dans son discours à usage interne mais aussi en direction du « Sud global », insiste sur le caractère « occidental » et non universel des valeurs démocratiques qui président à la vie politique à Taïwan depuis les années 1990, l’organisation régulière des élections dans l’île, et la possibilité d’alternances politiques, démontre que les principes démocratiques n’ont rien d’étranger au « monde chinois ». Pour les plus de 60 % de Taïwanais qui se reconnaissent comme « taïwanais » et les plus de 30 % qui se reconnaissent comme « chinois et taïwanais », la nature profondément démocratique du système politique de l’île constitue une part importante de leur identité.

Autre camouflet pour la République populaire de Chine (RPC) : les manœuvres de propagande et les tentatives d’influence faisant partie de la guerre de l’information, au cœur de la pensée stratégique chinoise et des fondements léninistes du régime, qui est censée pousser les Taïwanais à voter pour un parti, le Kouomintang – reconnaissant le principe « d’une seule Chine » –, ont démontré leur inefficacité.

Le régime chinois lui-même a considérablement nui à ses capacités d’influence, y compris auprès de ceux qui, à Taïwan, se sentent encore des attaches avec le continent. Depuis son arrivée au pouvoir, en 2013, Xi Jinping a multiplié les provocations, les actions agressives et les déclarations sans concession pour saborder le principe « un pays, deux systèmes » et convaincre les Taïwanais d’accepter une « unification » avec le continent. En imposant brutalement la loi de sécurité nationale à Hongkong et en poursuivant ses opposants, Pékin a réduit le peu de chance qu’il avait de séduire une société ouverte et libre comme celle de Taïwan.

Deux économies très liées

Pour Pékin, le danger vient du caractère potentiellement contagieux du fonctionnement démocratique à Taïwan. Sur le continent, la censure et le contrôle d’Internet limitent l’accès aux informations, mais les Chinois de la RPC savent ce qu’il se passe sur l’île. Le défi que représente l’élection d’un président indépendantiste, la transparence du fonctionnement démocratique ainsi que le respect de la population et des électeurs constituent autant de coups portés au discours de toute-puissance du Parti communiste chinois.

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