« La reprise en main du secteur financier par la puissance publique s’avère nécessaire »

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L’austérité est de retour en Europe. La « réforme » récente du pacte de stabilité en garde les éléments essentiels, les dogmes des 3 % du PIB de déficit budgétaire et des 60 % du PIB pour la dette publique ainsi que sa logique punitive. Des coupes budgétaires massives sont maintenant annoncées dans la plupart des pays européens. L’absurdité de cette politique n’est plus à démontrer. Elle est soulignée par des économistes que l’on ne peut soupçonner d’hétérodoxie.

Ainsi, Olivier Blanchard, ancien économiste en chef du Fonds monétaire international, a déclaré, le 4 mars, au Monde : « Réduire le déficit trop vite quand l’activité freine risque en effet d’accentuer le ralentissement. Or, les prévisions de croissance pour l’Europe viennent d’être révisées à la baisse. Il faut donc être prêt à soutenir encore l’économie, même si cela implique un déficit plus important pendant un moment. »

Déjà, après la crise financière de 2008, les politiques d’austérité menées conjointement en Europe avaient abouti à une récession généralisée en réduisant la demande et avaient été une des causes de l’accroissement des déficits publics. Ce constat est aujourd’hui largement partagé. Ce qui l’est moins, c’est l’analyse des racines de cette situation. Elles sont de trois ordres.

Emprise des marchés financiers sur la dette

Tout d’abord, un déficit est la marque d’un décalage entre les dépenses et les recettes, ce qui pose la question de la fiscalité. Dans l’Union européenne, le taux de l’impôt sur les sociétés est passé de 31,9 % en moyenne en 2000 à 21,5 % en 2021. En France, déjà en 2010, le rapport Champsaur-Cotis au président de la République, Nicolas Sarkozy, avait alerté sur ce problème et expliqué qu’« en l’absence de baisses de prélèvements la dette publique serait environ 20 points de PIB plus faible aujourd’hui ».

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La situation n’a fait qu’empirer depuis. Les mesures en faveur des ménages les plus riches et des grandes entreprises se sont multipliées, coûtant chaque année 70 milliards d’euros au budget de l’Etat. Une réforme fiscale donnant des moyens financiers à la puissance publique et rétablissant une justice fiscale aujourd’hui mise à mal devrait être une priorité.

Le deuxième problème tient à l’emprise des marchés financiers sur la dette publique de la France et des pays de la zone euro, emprise qui relève d’une décision politique datant des années 1990, avec notamment le traité de Maastricht. Lorsque les taux d’intérêt réels (défalqués de l’inflation) sont nuls ou négatifs et que les liquidités sont abondantes, ce qui était le cas ces dernières années avec la politique « non conventionnelle » menée par la Banque centrale européenne (BCE), ce problème pouvait être relativisé.

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