Jugé en appel, Gabriel Fortin, le « tueur de DRH », ne souhaite pas assister aux débats

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Bertrand Sayn, l’un des deux avocats représentant Gabriel Fortin, au palais de justice de Grenoble, le 13 mai 2023.

Dès l’ouverture de son procès en appel, lundi 13 mai à Grenoble, Gabriel Fortin, surnommé « le tueur de DRH », a donné le ton : il ne souhaite pas comparaître, n’ayant « rien à dire » sur sa mortelle équipée de 2021. Vêtu de noir, crâne rasé et léger embonpoint, l’accusé, dont la présence était incertaine, a finalement fait son entrée peu après 14 heures dans le box vitré de la cour d’assises de l’Isère, qui le juge jusqu’au 29 mai pour trois assassinats et une tentative d’assassinat.

A peine le tirage au sort des jurés terminé, et alors que la présidente de la cour se lançait dans la lecture de son rapport, Gabriel Fortin a soudainement demandé la parole pour déclarer qu’il ne souhaitait « ni assister aux débats » ni « venir dans cette enceinte ». « Je souhaite quitter le bâtiment et ne pas revenir dans les prochains jours. » La présidente a fait « acter » cette demande, tout en suggérant qu’il pourrait être contraint à comparaître ultérieurement.

Jugé en première instance à Valence, Gabriel Fortin, 49 ans, a été condamné en juin 2023 à la prison à perpétuité, assortie d’une peine de sûreté maximum de vingt-deux ans. Les jurés avaient retenu que des troubles psychiques avaient altéré son discernement, sans appliquer de diminution de peine. Une nouvelle expertise psychiatrique a entretemps été réalisée, selon la présidente de la cour, et sa santé mentale sera l’un des enjeux du procès.

« Il n’est pas le Gabriel que j’ai connu avant »

Premier témoin appelé à la barre, son frère aîné Olivier a longuement dépeint leur enfance sans père mais « normale », puis l’évolution de leurs rapports, de plus en plus distendus après l’adolescence. Il ignorait notamment que son cadet était devenu membre d’un club de tir : « Si je l’avais su, je me serais beaucoup plus inquiété, c’eût été un indice important », a-t-il lancé, ajoutant : « Pour moi, il est malade, il est fou. Il n’est pas le Gabriel que j’ai connu avant. »

En première instance, Gabriel Fortin n’avait pas donné d’explication à ses gestes, ni fait preuve de remords. Hermétique, voire glacial, il s’était posé en victime, dénonçant des « atteintes personnelles » et une enquête à charge. Il était apparu que l’ingénieur discret habitant Nancy, amateur de tir sportif et socialement isolé, vivait le chômage comme une injustice et ne supportait pas son déclassement social.

Dès les premiers jours d’enquête, le parquet avait souligné que ses actes semblaient avoir été minutieusement préparés. L’ingénieur nourrissait une rancœur tenace : trois des quatre victimes avaient été associées à ses deux licenciements, l’un en Eure-et-Loir en 2006 et l’autre en Ardèche en 2009. La quatrième travaillait dans une agence Pôle emploi de Valence qu’il avait fréquentée.

Le « risque d’un procès pour rien »

C’est à Valence qu’il avait abattu le 28 janvier 2021 une conseillère, Patricia Pasquion, 54 ans, avant de se rendre à Guilherand-Granges, en Ardèche, pour tuer Géraldine Caclin, 51 ans, directrice des ressources humaines de Faun Environnement, dont il avait été licencié.

Après une arrestation mouvementée, menée par des policiers qui avaient percuté son véhicule alors qu’il circulait à contresens sur un pont, le lien s’était établi rapidement avec un autre meurtre et une agression armée survenus deux jours plus tôt dans le Haut-Rhin. Estelle Luce, encore une DRH, avait été tuée par balle sur le parking de son entreprise. Bertrand Meichel, également dans les ressources humaines, a échappé quant à lui de peu à une agression armée à son domicile.

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Pour les familles des victimes présentes au procès en appel à Grenoble, il semble peu probable que l’accusé renonce à son attitude rigide. « Je n’ai aucune attente. S’il bouge, je ne peux être qu’agréablement surpris », a déclaré à l’Agence France-Presse Bertrand Meichel, qui devra témoigner à nouveau devant la cour de ce qu’il a subi. « Ce n’est pas simple. On fait avec. » Pour Denis Dreyfus, un des avocats des parties civiles, « s’il reste dans le silence », il y a un « risque d’un procès pour rien si ce n’est prolonger l’extrême souffrance des victimes ».

Le Monde avec AFP

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