Intel, les subventions ne font pas un champion

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Le président américain, Joe Biden, écoute le PDG d’Intel, Pat Gelsinger (à gauche), sous le regard du directeur de l’usine Intel, Hugh Green, lors d’une visite du campus Intel Ocotillo, à Chandler (Arizona), le mercredi 20 mars.

Pour savoir si une entreprise américaine est mal gérée, il suffit de vérifier si son patron passe son temps à la Maison Blanche. Intel, gloire déchue des microprocesseurs, dirigé par Pat Gelsinger, confirme la règle. L’entreprise devrait être la plus grande bénéficiaire des subventions massives aux microprocesseurs accordées par le président américain, Joe Biden, dans le cadre du Chips Act voté à l’été 2022. Mais déverser l’argent du contribuable ne suffit pas à recréer une entreprise performante, quand on s’est fait durablement distancer par ses concurrents.

Intel a lourdement chuté en Bourse mercredi 3 avril, de 8,2 %, après qu’elle a révélé ses résultats dans la fabrication des microprocesseurs : elle a enregistré dans cette division nouvellement constituée, Intel Foundry, un chiffre d’affaires de 18,9 milliards de dollars (17,4 milliards d’euros) en 2023 contre 27,5 milliards de dollars en 2022. Les pertes, elles, ont bondi de 5,2 à 7 milliards de dollars. L’entreprise s’attend à ce que 2024 soit le pic de ses pertes et qu’Intel Foundry soit rentable, sur le plan opérationnel, « à mi-chemin d’ici la fin de 2030 ». Dans très longtemps. De ce fait, Intel est doublement distancé, par les fabricants de microprocesseurs, les « fonderies », à savoir le taïwanais TSMC et le coréen Samsung, et par leurs concepteurs, notamment le champion de l’intelligence artificielle Nvidia. L’entreprise a perdu 20 % de sa valeur en Bourse depuis le début de l’année et vaut 185 milliards de dollars, contre 727 milliards de dollars pour TSMC et 2 240 milliards de dollars pour Nvidia.

Cent quatre-vingt-cinq milliards de dollars seulement, alors que la firme pourrait empocher à l’avenir quelque 50 milliards de dollars de subventions fédérales, sous forme d’aides directes, qui pourraient financer en partie un programme de 100 milliards de dollars d’investissements, en Arizona, dans le Nouveau-Mexique et dans l’Ohio. Pourtant, « M. Gelsinger en veut plus », s’indigne The Wall Street Journal, citant les récents propos de Pat Gelsinger. La fabrication américaine de puces, selon le PDG, « ne peut pas être réglée en un seul programme de trois à cinq ans. Je pense que nous aurons besoin d’au moins un Chips 2 pour terminer ce travail ».

Travaux au point mort

Dans son éditorial du mercredi 3 avril, le Wall Street Journal tire à boulet rouge sur Intel et l’administration Biden, qui l’a poussé à se lancer dans des investissements gigantesques à la rentabilité douteuse. « En janvier 2022, Pat est venu à la Maison Blanche, où nous avons annoncé un investissement historique pour construire une usine de semi-conducteurs de pointe dans l’Ohio », a déclaré M. Biden. En mars 2022, « Pat était mon invité à la conférence sur l’état de l’Union » et, en septembre, « j’ai rejoint Pat dans l’Ohio (…) pour inaugurer la nouvelle usine », raconte le Wall Street Journal. « Comment Pat pouvait-il dire non à son nouveau boss ? », ricane le journal.

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