François Cassingena-Trévedy, le « paysan de Dieu »

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Photo personnelle de François Cassingena-Trévedy sur le plateau de Cézallier, dans le Cantal.

Installé depuis 2021 sur le plateau de Cézallier, dans le Cantal, François Cassingena-Trévedy, 65 ans, le décrit comme sa terre promise. « J’aime son silence, ce vide énorme, c’est un autre monde. Je vis à 900 mètres d’altitude sur une épine montagneuse, une terre émergée où le monde paysan survit. »

Ce moine catholique, en outre écrivain et maître de conférences – à distance – à l’Institut catholique de Paris, veut s’y incarner, en devenir un autochtone. « Je n’y suis pas né, mais j’y suis re-né », assure-t-il.

Le religieux, qui a auparavant passé vingt-cinq ans à l’abbaye Saint-Martin de Ligugé (Vienne), au sud de Poitiers, travaille désormais gratuitement en tant qu’ouvrier agricole, auprès de divers paysans du Cantal faisant appel à lui. « Le prêtre-ouvrier, ce salarié inséré dans vie professionnelle, demeure pour moi un idéal d’existence, explique-t-il. J’aime les paysans, leur naïveté, leur rudesse douce. Je partage avec eux un grand métier d’homme. Je n’ai aucune intention prosélyte, je suis là un peu comme le père Charles de Foucauld [1858-1916, officier devenu religieux en Algérie] était au milieu des Touareg. »

« Souffrance des paysans »

De cette existence rustique au grand air, frère François a tiré un épais journal de bord en trois tomes, dont le dernier, Paysan de Dieu (Albin Michel, 240 pages, 21,90 euros), est sorti le 4 septembre. Il y mêle son quotidien rude et sa contemplation de la nature à son amour pour la liturgie grégorienne (VIIIe siècle) et sa connaissance des pères de l’Eglise, des auteurs des huit premiers siècles de notre ère dont les commentaires bibliques ont influencé la doctrine chrétienne jusqu’à nos jours – François Cassingena-Trévedy a notamment signé deux traductions de référence des hymnes de saint Ephrem, un poète mystique syrien du IVe siècle (Cerf, 2001 et 2006).

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« Avec Paysan de Dieu, j’ai voulu offrir aux lecteurs le visage d’un Dieu incarné, qui n’a rien d’un manitou ni d’un gendarme, explique-t-il de sa voix posée, tout en caressant sa barbe poivre et sel. Je suis un solitaire-social et non un ermite. Mon bonheur est possible au prix d’un retirement et d’un renoncement, mais mes amitiés avec les paysans représentent un véritable chemin de sagesse. »

Le lecteur de Paysan de Dieu suit François Cassingena-Trévedy le long de ses journées autour du village de Sainte-Anastasie – 148 habitants recensés. « A 6 heures du matin, seul dans mon oratoire, je célèbre la liturgie des heures et la liturgie eucharistique. Puis j’enlève mon aube blanche et j’enfile ma combinaison agricole et mes bottes, pour travailler dans mon potager. » Et, l’après-midi, il se rend régulièrement – à pied ou en stop – dans les fermes aux alentours qui ont besoin de lui : avec son sac à dos vert kaki et son pantalon de treillis à poches, on le confondrait avec un randonneur.

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