enquête intime et familiale sur la bipolarité

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Visuel du podcast « Sur le fil ».

ARTE RADIO – À LA DEMANDE – PODCAST

Alors qu’elle croit entendre son fils, 3 ans seulement, lui dire « Je me sens triste », Laetitia Druart panique. Persuadée depuis toujours qu’une « malédiction » plane sur sa famille (« Elle a tué mon grand-père, ma grand-mère et a presque failli avoir ma mère »), la journaliste décide de se renseigner plus avant. Quelle est cette maladie, quelle forme prend-elle (pour elle, c’est un « cavalier noir ») et, surtout, comment y échapper et en protéger ses enfants ?

Episode 1, dans le sous-sol de la maison de sa mère. Qui explique : « Mais mamie, c’est pas de sa faute. Son père a essayé de coucher avec toutes ses sœurs. C’était la plus vieille, elle a pu se défendre. Elle aurait dû se faire soigner par rapport à ça dès le départ. On ne savait pas tout ça. Aujourd’hui, ça ne se passerait pas comme ça. » Beaucoup de « ça » et une grand-mère qui fera huit tentatives de suicide, « ça fait pas mal de Noëls foirés et de sacs de larmes. Et, à 84 ans, la neuvième tentative fut la bonne », se rappelle Laetitia Druart.

Elle revient ensuite sur la tentative de suicide de sa mère, en 2020, alors qu’elle-même attendait son premier enfant : « J’en suis ressortie avec un fils, et elle, avec un diagnostic de bipolarité, ce trouble de l’humeur qui fait alterner phases de dépression sévères avec des périodes où le patient est exalté. »

« Grands huit » émotionnels

Voilà, le mot est enfin lâché, et alors même qu’il aura fallu que son grand-père ait 40 ans pour être diagnostiqué. De lui, Laetitia Druart a choisi de garder une boussole en bois. Et c’est sans doute pour ne pas perdre le nord ni la main qu’elle a choisi de mener l’enquête (une enquête familiale), et de la nourrir de témoignages de personnes bipolaires et de la parole de psychiatres. Ainsi de la psychiatre Marion Leboyer, qui rappelle que, en France, 2 % de la population serait atteinte de bipolarité, que cette maladie est largement héréditaire (à 70 %), mais que les causes qui la déclenchent sont multifactorielles. Bref, « il n’y a pas de malédiction, mais des risques », résume Laetitia Druart, inquiète, alors qu’elle est mère pour la deuxième fois : « Je me sens sur le fil. »

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Sur le fil, mais bien décidée à trouver un bouclier pour la protéger de ce « cavalier noir ». A l’épisode suivant, elle raconte comment, depuis dix ans, elle tente d’apprivoiser sur le divan ses « grands huit » émotionnels. Comment sa mère est désormais soignée au lithium (la molécule la plus connue contre les troubles bipolaires) et en paix avec cette nécessaire béquille : « Les médicaments m’aident à me maintenir dans le bien », assure-t-elle.

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Marion Leboyer ajoute alors que les stratégies préventives ont aussi leur rôle à jouer : sommeil, activité physique, alimentation, etc. Le psychiatre Didier Papeta rassure aussi Laetitia Druart quand il lui dit : « Pour vous, le risque est faible, je pense. Vous avez une hygiène de vie qui vous protège, vous apprenez à mieux gérer vos émotions, donc vous diminuez les risques de déclencher la pathologie. Vous y intéresser vous offre déjà une protection, vous êtes dans une approche cognitive du trouble. »

Un « récit » qui lui convient, et qui éclaire, de manière sensible et grâce à une belle mise en ondes, ce que l’on a longtemps appelé les « troubles maniaco-dépressifs ».

Sur le fil, podcast de Laetitia Druart, réalisé par Arnaud Forest (Fr., 2024, 4 × 30 min). Sur Arte Radio et toutes les plates-formes d’écoute habituelles.

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