En Uruguay, le narcotrafic ronge le port de Montevideo

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La tonne de cocaïne saisie par la police uruguayenne, à Montevideo, le 20 septembre 2024.

Dans le port de Montevideo, situé sur l’estuaire du Rio de la Plata, dans le sud de l’Uruguay, les allées et venues sont incessantes. En cette matinée grise d’octobre, des bateaux de pêche coréens transfèrent leurs prises dans des camions réfrigérés, tandis que des convoyeurs à bande déversent des tonnes de céréales dans trois longs navires vraquiers.

Plus loin, à côté d’une route bruyante où défilent les camions forestiers, des ouvriers s’affairent sur plusieurs chantiers clôturés : face à l’augmentation du trafic de conteneurs, qui a bondi de 62 % depuis 2019, les autorités du port ont prévu de nombreux aménagements, dont l’élargissement de 27 hectares du terminal où s’empilent les blocs multicolores.

Mais ce projet ambitieux, qui vise à transformer le port en un hub logistique régional, risque aussi d’accroître son attractivité pour l’acheminement d’une marchandise qui se dissimule de plus en plus régulièrement dans les cargaisons à destination d’Europe : la cocaïne. Ces derniers mois, les polices européennes ont découvert plusieurs tonnes de drogue dans des navires en provenance de Montevideo, cachées dans de la farine de soja ou des sacs de riz.

En Uruguay, petit pays sud-américain de 3,3 millions d’habitants longtemps perçu comme un havre de paix dans la région, l’arrivée du narcotrafic a fait naître de graves problèmes de sécurité : à l’approche des élections présidentielle et parlementaires organisées dimanche 27 octobre, « l’insécurité, la criminalité et le trafic de drogue » sont devenus la préoccupation principale de 47 % de la population, selon l’Institut Cifra, selon lequel le candidat de l’opposition de gauche, Yamandu Orsi, est en tête des intentions de vote (44 %).

Le pays est devenu un lieu de stockage

La pression de phénomènes aussi divers que le plan Colombie en 1999 (une aide américaine pour lutter contre la drogue), l’accord entre Bogota et la guérilla des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) en 2016 et, plus récemment, la pandémie de Covid-19, provoquent une reconfiguration permanente des routes de la cocaïne. La production s’est amplifiée et s’est étendue vers le sud, faisant de la Bolivie un centre de fabrication de cette drogue. La poudre blanche suit un nouvel itinéraire, empruntant la voie fluviale « Parana-Paraguay », qui relie l’est de la Bolivie au Paraguay, au Brésil, à l’Argentine et à l’Uruguay, avant d’être expédiée vers le Vieux Continent.

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Conséquence, en Uruguay, le trafic a explosé. Le pays est devenu depuis quelques années un lieu de stockage. Face à l’augmentation du volume du trafic, les organisations criminelles cachent le produit, surtout dans de grandes propriétés rurales, avant de l’exporter. En contrepartie, les criminels locaux en gardent une partie qu’ils revendent à des petits trafiquants, surtout dans les quartiers défavorisés de Montevideo. La drogue est ensuite écoulée dans des points de vente appelés « bocas », provoquant une hausse de la violence. Entre 2013 et 2023, les homicides ont augmenté de 46 %, selon les données du ministère de l’intérieur.

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