En Syrie, la bataille pour la préservation des preuves des crimes du régime Al-Assad

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Des Syriens fouillent dans des documents retrouvés dans la prison de Saydnaya, près de Damas, pour essayer de retrouver leurs proches disparus, le 9 décembre.

Ce sont des milliers de documents et de témoignages collectés dès les premières heures de la guerre, en mars 2011, et même bien avant, qui formeront peut-être les futures pièces à conviction des crimes de l’ancien régime syrien. La Syrie de la dynastie Al-Assad, dont le règne d’un demi-siècle s’est achevé dimanche 8 décembre, est une histoire de massacres et de torture à l’échelle industrielle, annotés avec la glaciale précision du système nazi.

« L’Etat syrien lui-même a documenté presque tous ses actes de torture, d’abus et d’exécutions dans ses propres archives », estime Peter Bouckaert, directeur de l’ONG Fortify Rights. « La Syrie était une machine à tuer bureaucratique sous Bachar Al-Assad », ajoute celui, qui à la chute de Mouammar Kadhafi, avait récolté, pour Human Rights Watch, des dizaines de documents dans les archives des services de renseignement civils et militaires de l’Etat libyen à Tripoli, en 2011. Joint par téléphone à Berlin, l’avocat syrien Anwar Al-Bunni, qui a longtemps plaidé pour les opposants au régime syrien avant de devoir prendre à son tour l’exil, en 2014, a déjà « demandé à ceux sur place de collecter les documents, les possibles preuves, et de garder tout cela jusqu’à ce que l’on puisse le donner à un juge ou un procureur ».

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Dans les heures les plus graves et les plus extraordinaires des guerres et des révolutions, les vaincus détruisent les preuves de leurs crimes. Depuis une quinzaine d’années, notamment parce que la justice internationale est venue détrôner les lois d’amnistie, les vainqueurs tentent au contraire de préserver ces preuves. Ouvrir les tiroirs du régime pour en mesurer toute l’horreur et un jour, peut-être, la juger.

Ne pas polluer les scènes de crimes

« Nous avons déjà des indications selon lesquelles, heure après heure, des preuves potentielles de l’appareil répressif du gouvernement deviennent disponibles alors que les agents du régime en fuite se retirent en toute hâte », a indiqué, dimanche, le chef du Mécanisme international, impartial et indépendant (M3I), Robert Petit. Créé par l’ONU en 2017, le M3I est chargé de réunir les pièces collectées par des dizaines d’enquêteurs depuis le début de la guerre en Syrie, en 2011, quand des ONG, des avocats et des opposants au régime se sont mis à collecter les preuves des exactions.

Etablie en 2011, la commission d’enquête des Nations unies sur la Syrie a demandé, dimanche, à Hayat Tahrir Al-Cham (HTC) et aux autres groupes armés de « faire très attention à ne pas perturber les preuves de violations et de crimes » en s’emparant des prisons. Ne pas polluer les scènes de crimes du régime Al-Assad. Selon cette commission, « tout au long de la guerre, les familles se sont mises en grand danger et ont versé des sommes exorbitantes en pots-de-vin à des fonctionnaires corrompus pour obtenir des nouvelles de leurs proches. Aujourd’hui, dans des vidéos récemment diffusées de l’intérieur des centres de détention, nous voyons des pièces avec des rangées d’étagères remplies de dossiers ».

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