En Italie, Robby le taxi roule pour l’honnêteté

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Roberto Mantovani, à Bologne, le 29 mars 2023.

Appelez-le « Robby ». C’est comme ça que les proches de Roberto Mantovani, 55 ans, le surnomment à Bologne. Mais, depuis un an, l’homme qui promène son Volkswagen Touran dans les rues de la capitale d’Emilie-Romagne, au nord de la Toscane, n’a pas que des amis. Surtout au sein de sa profession. Après avoir été sapeur-pompier puis avoir travaillé à la fourrière de la municipalité, Roberto Mantovani, que « M » avait rencontré en mai 2023, a sauté le pas et s’est acheté en 2016 une licence de taxi. « Le plus beau métier du monde dans la plus belle ville du monde », raconte-t-il dans Tassista di notte, avventure di una vita contromano (« taxi de nuit, ­aventures d’une vie à contre-courant », Garzanti, 2024, non ­traduit), un livre publié au début de l’été.

Robby y partage ses rencontres nocturnes parfois insolites, sa passion pour les Red Sox, l’équipe de base-ball de Boston, et y déclare son amour à sa ville. « Roberto m’a raconté Bologne comme personne d’autre. Quand j’ai une question sur une rue, un quartier, c’est lui que j’appelle », confie son ami écrivain Carlo Lucarelli, qui a fait du chauffeur de taxi un des personnages de son dernier polar.

Alors qu’il est invité dans toutes les librairies de la Péninsule, la sortie du livre a conforté son image de « taxi le plus célèbre d’Italie ». Et pour cause, il s’agit d’un réquisitoire contre l’un des maux incurables de l’Italie : l’évasion fiscale. Tout a basculé sur les réseaux sociaux quand, en mai 2023, Roberto Mantovani décide de publier sur son compte X (encore Twitter à l’époque), le détail de ses recettes brutes mensuelles. Selon les chiffres officiels du fisc, un chauffeur italien gagne en moyenne 1 300 euros brut par mois. Or, les revenus dévoilés du « taximan » bolognais frisent parfoisles 10 000 euros brut mensuels. Robby ne supporte pas les plaintes de ses confrères contre l’Etat-voleur, alors que beaucoup font du black.

La loi du silence

« Tu vas tuer notre profession », lui lance un collègue qui, comme lui, travaille pour la Cotabo, la coopérative des taxis bolognais. « Si tu veux parler des taxis, la seule règle, c’est d’en dire du bien. On est une famille, unie et intouchable », rapporte-t-il dans son livre. Une loi du silence que l’on croirait importée de Calabre, terre de l’organisation mafieuse ’Ndrangheta. Celui que Roberto fait parler, c’est un confrère, qu’il a prénommé « Benito », incarnation d’une profession ­gangrenée selon lui par le corporatisme.

A l’été 2022, le gouvernement de Mario Draghi exige des chauffeurs de taxi qu’ils disposent d’un terminal de paiement par carte bancaire, provoquant la colère de la profession. Dans plusieurs villes, nombre d’entre eux se mettent alors en grève. Robby raconte les boucles WhatsApp où l’on se vante d’avoir fait une « journée propre », à savoir réussi à n’être payé qu’en espèces. Le chauffeur n’avait pas mesuré l’onde de choc qu’il allait provoquer.

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