La guerre n’a pas influé sur sa décision. La Cour suprême israélienne a invalidé, lundi 1er janvier, une disposition-clé de la réforme judiciaire très controversée promue par le gouvernement de Benyamin Nétanyahou, qui prévoyait d’ôter au pouvoir judiciaire le droit de se prononcer sur « le caractère raisonnable » des décisions de l’exécutif ou du Parlement israélien. Architecte de cette réforme et numéro deux du gouvernement, le ministre de la justice, Yariv Levin, a accusé sur Telegram la Cour de « s’arroger tous les pouvoirs ». « Dans les faits, les juges tiennent entre leurs mains, avec cette décision, tous les pouvoirs qui, dans un régime démocratique, sont répartis de manière équilibrée entre les trois pouvoirs [exécutif, législatif et judiciaire] », a-t-il fustigé, non sans critiquer la publication de cet arrêt « en pleine guerre, ce qui va à l’encontre de l’unité nécessaire pour le succès de nos combattants sur le front ».
Rejetée par huit des quinze juges, la mesure invalidée avait déclenché l’un des plus importants mouvements de contestation de l’histoire d’Israël, éclipsé, depuis, par la guerre menée par l’armée israélienne dans la bande de Gaza en représailles à l’attaque sanglante lancée le 7 octobre par le Hamas sur le territoire hébreu. La décision de la Cour suprême ramène sur le devant de la scène un sujet qui a profondément divisé la société, aboutissant à la contestation la plus massive de l’histoire de ce pays de 9 millions d’habitants.
Chaque semaine pendant sept mois, de janvier jusqu’à l’été, des centaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue à l’unisson, selon les sondages, d’une majorité de l’opinion publique. La puissance du mouvement n’avait cependant pas fait reculer Benyamin Nétanyahou. Après avoir feint de négocier, le premier ministre avait finalement appuyé la réforme votée, dans une première étape, en juillet 2023.
Un vide institutionnel comblé
Celle-ci consistait principalement en un amendement, à majorité simple, d’une Loi fondamentale – un corps de règles tenant lieu de Constitution en Israël –, retirant à la haute juridiction le pouvoir d’annuler une décision du gouvernement pour des motifs jugés « déraisonnables ». Ce pouvoir était utilisé afin d’empêcher des nominations dans l’exécutif ou d’invalider des décisions administratives, pour des questions d’éthique ou contre des risques de corruption ou de conflit d’intérêts. Il avait notamment servi à écarter, en février 2023, d’un poste ministériel, Arié Déri, le chef du parti Shass, puissant allié dans la coalition de Benyamin Nétanyahou, alors qu’il s’était justement engagé à ne pas solliciter de portefeuille.
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