En Espagne, Pedro Sanchez obtient le soutien des indépendantistes catalans au prix de concessions qui enflamment le pays

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Lors d’une manifestation près du siège du Parti socialiste ouvrier espagnol, une pancarte sur laquelle on peut lire : « Nous voulons la justice, pas des concessions pour la Catalogne », à Madrid, le 8 novembre 2023.

Le principal obstacle à la réédition d’un gouvernement de gauche en Espagne a été levé jeudi 9 novembre, ouvrant la voie à une possible investiture la semaine prochaine du premier ministre sortant, le socialiste Pedro Sanchez. Au prix de larges concessions aux indépendantistes catalans, le Parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) a signé un accord avec le parti Junts, afin d’obtenir le soutien de ses sept députés. Le leader socialiste négociait à Bruxelles depuis des semaines avec l’ancien président du gouvernement catalan Carles Puigdemont, qui a fui la justice espagnole après la tentative de sécession de 2017.

Le texte de quatre pages inclut une loi d’amnistie, particulièrement controversée, englobant toutes les personnes ayant « fait l’objet de décisions ou procédures judiciaires » liées à la tenue de la consultation indépendantiste de 2014 et du référendum illégal de 2017. Dans l’attente de connaître les contours exacts du texte, il est probable qu’outre les délits de malversation de fonds publics, ceux de désordres publics soient également inclus. Cela pourrait donc englober les violences commises en 2019 après les condamnations pour « sédition » des dirigeants indépendantistes à de lourdes peines de prison. « Aucun de ceux qui ont été pourchassés par l’Etat espagnol n’en sera exclu », a insisté à Bruxelles M. Puigdemont, qui a salué un « accord historique ».

Le texte prévoit la tenue de négociations lors desquelles les indépendantistes demanderont notamment l’indépendance financière de la Catalogne, et celle d’un référendum d’autodétermination, auquel le PSOE précise qu’il continue de s’opposer. Il intègre aussi un « mécanisme de vérification » des accords, mené par médiateurs internationaux à l’étranger. Une demande de longue date des indépendantistes, autant destinée à faire avancer leurs dossiers qu’à délégitimer la démocratie espagnole. Par ailleurs, l’exposé des motifs de l’accord d’investiture reprend l’argumentaire des indépendantistes, qui font remonter le conflit catalan à 1716, date de l’abolition des institutions régionales sous l’Ancien Régime, et dressent une liste de griefs contre l’Etat pour justifier la tenue du référendum illégal de 2017.

« L’Espagne n’est pas à vendre »

A ces concessions s’ajoutent celles obtenues le 2 novembre par la Gauche républicaine de Catalogne (ERC), à savoir l’effacement de 20 % de la dette catalane, soit 15 milliards d’euros, et le transfert des compétences en matière de contrôle des chemins de fer régionaux. « Il est nécessaire de former au plus tôt un gouvernement progressiste qui donne de la stabilité à l’Espagne, s’est justifié le numéro trois du PSOE, Santos Cerdan, qui a mené les négociations avec M. Puigdemont. Nous sommes prêts à ouvrir une nouvelle étape historique vers une solution politique et négociée au conflit. »

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