En Côte d’Ivoire, les accusés de l’attentat de Grand-Bassam de retour devant le tribunal

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Les accusés de l’attentat de Grand-Bassam lors du procès en première instance devant le tribunal criminel d’Abidjan, le 28 décembre 2022.

Huit ans après les faits et un an et demi après leur procès en première instance, les accusés de l’attentat terroriste de Grand-Bassam sont de retour devant la justice ivoirienne. Du moins en partie. Comme lors du premier jugement en 2022, quatre hommes sont attendus, vendredi 17 mai, sur les bancs de la cour d’appel : Hantao Ag Mohamed Cissé, Sidi Mohamed Kounta, Mohamed Cissé et Hassan Barry. Les quatorze autres inculpés sont détenus au Mali ou en cavale.

L’attaque, qui avait fait 19 morts (dont sept civils ivoiriens et quatre français) et 33 blessés dans la station balnéaire de Grand-Bassam le 13 mars 2016, avait été revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Une tuerie présentée comme un acte de représailles contre les opérations antidjihadistes françaises « Serval » au Mali et « Barkhane » au Sahel, mais aussi contre la Côte d’Ivoire, accusée d’avoir livré des membres d’AQMI aux autorités maliennes.

En première instance, le juge Charles Bini avait suivi le réquisitoire du procureur de la République et condamné à la prison à perpétuité dix des 18 accusés, dont les quatre présents, malgré leurs dénégations et des lacunes dans le dossier d’instruction pointées par leurs avocats. L’un d’entre eux, Eric Saki, avait alors qualifié ses clients de « présumés terroristes », des « boucs émissaires idéaux » destinés à « payer à la place des autres pour faire un exemple ». Pour leur procès en appel, l’avocat plaidera de nouveau l’acquittement « parce que les éléments du dossier vont dans ce sens », estime-t-il.

Le cerveau de l’attaque, le Malien Kounta Abdallah dit « Kounta Dallah », est toujours en fuite. Et, plaide la défense, les accusés présents n’ont été que les « petites mains » du commando. Mohamed Cissé est poursuivi pour avoir servi de chauffeur à Kounta Dallah, Sidi Mohamed Kounta pour l’avoir hébergé à Abidjan. Hantao Ag Mohamed Cissé aurait effectué des repérages sur la plage de Grand-Bassam en amont de l’attentat ; une excursion qu’il ne nie pas mais qu’il présente comme un simple séjour touristique. Le dernier accusé, Hassan Barry, a convoyé des armes par voie routière depuis le Mali.

« Une formalité »

La justice ivoirienne n’est pas parvenue à mettre la main sur les principaux coupables. Kounta Dallah est introuvable depuis 2016. Le Malien Mimi Ould Baba a quant à lui été arrêté dans son pays par des militaires français de « Barkhane », en 2017, et incarcéré à Bamako. La justice ivoirienne n’avait pas requis sa présence lors du procès en première instance parce que son extradition vers les Etats-Unis – où il est poursuivi pour sa participation supposée aux attaques du 15 janvier 2016 à Ouagadougou – était jugée imminente. Elle n’a finalement jamais été annoncée. Condamné à perpétuité par contumace, Mimi Ould Baba ne devrait pas non plus assister à son procès en appel.

Les parties civiles – dont des Français, qui suivront de nouveau le procès en direct par visioconférence – espèrent voir les dommages et intérêts accordés en première instance confirmés par le tribunal, ce qui ouvrirait le droit à la réparation du préjudice qu’elles attendent depuis huit ans. Sont concernés au premier chef les survivants de l’attaque, dont certains souffrent encore de séquelles physiques ou psychologiques, et les familles des victimes ; mais aussi les propriétaires d’établissements hôteliers endommagés ou partiellement détruits par les impacts de balles, comme l’Etoile du Sud et la Paillote, qui ont rapporté à la barre avoir subi une forte baisse de fréquentation depuis l’attaque.

Le procès en appel a peu de chances de déboucher sur de nouvelles révélations. « C’est davantage une formalité, reconnaît une source proche du dossier. On n’attend plus grand-chose de cette affaire. » Du reste, le calendrier est encore incertain. Le tribunal criminel d’Abidjan avait renvoyé une première fois l’audience, initialement programmée le 25 avril, faute d’avocats pour défendre les prévenus à cause d’un conflit entre le barreau et le ministère de la justice autour de la rémunération des commissions d’office. Si la question n’est pas résolue d’ici à vendredi, le procès risque d’être encore reporté.

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