En Bretagne, le RN domine largement dans tous les départements

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Affiches de campagne des partis politiques et des candidats aux  élections européennes  à Rennes, le 28 mai 2024.

Au téléphone, Loïg Chesnais-Girard, président (divers gauche) de la région Bretagne, se dit « sonné », dimanche soir 9 juin. Les résultats des européennes ne laissent plus de doute. Le Rassemblement national (RN) s’impose largement dans tous les départements bretons avec 25,59 % des voix. Du jamais-vu dans cette région connue pour être la plus rétive aux idées d’extrême droite. « La Bretagne n’est pas étanche aux peurs ni à la fatigue démocratique à l’œuvre dans le pays. Nombre de nos concitoyens ont profité de cette élection qui leur semble lointaine pour exprimer leur ras-le-bol avec moins de retenue que lors d’un scrutin local », souffle l’édile. Loïg Chesnais-Girard s’empresse de souligner la « singularité » du score du RN, six points en dessous de la moyenne nationale.

Il n’empêche, ce résultat est un coup de tonnerre. Un « séisme », savoure Gilles Pennelle, directeur général du RN et élu eurodéputé. En 2013, il avait repris la fédération régionale du parti, dont personne ne voulait. Faisant oublier sa proximité passée avec l’extrême droite racialiste, cet ancien professeur d’histoire a su faire exister les idées du RN localement.

Longtemps honteux, le vote nationaliste est désormais assumé à la sortie des bureaux de vote. Dimanche, sur le parvis de la mairie d’Uzel (Côtes-d’Armor), commune rurale d’un millier d’habitants, José et Suzanne Diaz, deux retraités ayant fait carrière en région parisienne, encouragent à « essayer » le vote Bardella pour protester contre l’inflation. Maurice et Armelle Le Flohic, anciens employés dans l’agroalimentaire, opinent et veulent en finir avec le « manque d’autorité » de l’Etat, cette jeunesse « qui ne veut pas travailler », cette immigration à laquelle ils ne sont pas confrontés, mais qu’ils redoutent.

Tout autour, des commerçants, des cadres, des étudiants, des ouvriers agricoles abondent et évoquent un sentiment de délaissement dans cette Bretagne rurale où les services publics et les commerces ferment. Les réponses à la crise agricole du début d’année sont jugées insuffisantes. A Uzel comme dans nombre de territoires ruraux alentour, peu parlent d’Europe, mais beaucoup souhaitent une « déculottée » à Emmanuel Macron, symbole d’une classe politique honnie. Le vote RN ne résonne plus comme un avertissement, mais comme l’expression d’« une profonde envie de changement ».

Préfectures et villes moyennes résistent

En 2019, la liste de Jordan Bardella avait réuni 17,31 % des suffrages, principalement dans les campagnes bretonnes. Lors de l’élection présidentielle de 2022, Marine Le Pen avait encore progressé avec 19,53 % des votants. Désormais, l’audience de l’extrême droite s’amplifie jusque dans les zones périurbaines, pourtant correctement desservies par les transports en commun et bien dotés en équipements publics. Seules les préfectures et des villes moyennes résistent à la vague RN.

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