Derrière la grogne des taxis, la crise du transport médical

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Des chauffeurs de taxi français manifestent et bloquent le périphérique, à Paris, le 29 janvier 2024.

En 2012, les experts qui travaillaient sur le programme présidentiel de François Hollande, à la recherche d’économies dans les dépenses publiques, avaient repéré une coquette somme dans les comptes de la Sécurité sociale : 4 milliards d’euros consacrés chaque année aux seuls transports médicaux, y compris ceux assurés par les taxis conventionnés par la Sécurité sociale. Douze ans plus tard, cette enveloppe dépasse… 6 milliards d’euros.

Malgré cela, les taxis franciliens ont manifesté, lundi 29 janvier, autour du ministère de la santé pour protester contre le niveau de leur rémunération pour le transport de patients, tandis que leurs collègues organisaient des opérations escargot à Lyon, Marseille, Toulouse ou Bordeaux, mais aussi à Brest, Quimper, Blois… « On nous demande de signer le 1er février une nouvelle convention tarifaire pour cinq ans sans nous en donner les conditions précises », s’agace Bernard Crebassa, président de la Fédération nationale des artisans du taxi (FNAT). Pour l’instant, leur tarif ne serait revalorisé que de 1 centime du kilomètre en 2024, de l’ordre de 1 %. « Les tarifs de 2023 sont déjà en dessous du coût de nos structures », dénonce l’artisan. Le directeur général de la Caisse nationale d’assurance-maladie, Thomas Fatome, les recevra mardi 30 janvier.

Pourquoi un tel mécontentement, alors que l’enveloppe budgétaire n’a fait qu’augmenter ? Comme les agriculteurs, les responsables du transport médical regrettent l’absence de vision générale de l’Etat sur leur métier. « Le système est à bout de souffle, il faut qu’on en parle », explique Roland de Barbentane, président de Keolis Santé. Cette filiale de Keolis (groupe SNCF) compte 2 000 salariés et 900 véhicules : ambulances, véhicules sanitaires légers (VSL, pour les voyages assis) et taxis. « La hausse du transport sanitaire dans le budget de la Sécurité sociale, on peut dire que c’est colossal, reconnaît-il. Mais 4 % par an, ce n’est pas gigantesque par rapport aux tendances sous-jacentes. » M. de Barbentane détaille : organisation de l’hôpital autour de grands plateaux techniques de pointe, qui font que les patients doivent parcourir plus de kilomètres pour être soignés, développement de la médecine ambulatoire ou vieillissement de la population, qui réclame davantage de soins.

« Repenser le système dans son ensemble »

Les entreprises du secteur, elles, ne roulent pas sur l’or. Le transport sanitaire se répartit entre deux catégories d’acteurs. Les taxis, à qui l’Etat a ouvert ce marché du transport médical conventionné en 2009, et les ambulanciers, soumis à un numerus clausus. Une forme de concurrence a été organisée entre les deux corporations : l’Assurance-maladie espérait qu’elle ferait baisser les prix. En réalité, elle a fait exploser les volumes. Sur les 65 millions de courses médicales annuelles, les taxis en font désormais la moitié.

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