« Depuis le 7 octobre, c’est toute l’histoire du conflit israélo-palestinien qui se rejoue en accéléré »

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Le 13 juin 2023, j’étais à Gaza pour présenter mon Histoire de Jérusalem en bande dessinée (Les Arènes, 2022), devant un public d’étudiants palestiniens, de collègues universitaires et d’habitués de l’Institut français, qui accueillait la rencontre. Trois semaines plus tôt, le 24 mai 2023, j’avais présenté ce même ouvrage devant des collègues et des étudiants de l’université Bar-Ilan, en Israël. Dans les deux cas, les échanges avaient été riches et chaleureux.

A Gaza comme à Bar-Ilan, les étudiants avaient anticipé les futures publications de cette bande dessinée en arabe et en hébreu, en traduisant quelques planches avec leurs enseignants. A la fin de ces rencontres, on avait partagé gâteaux et jus de fruits en parlant de choses et d’autres, insouciants.

Depuis, le monde a basculé sur son axe. Ces souvenirs heureux ont été ensevelis dans le fracas des massacres et des bombardements. Dix-huit étudiants de Bar-Ilan sont morts dans les attaques terroristes du 7 octobre 2023 ou dans les combats qui ont suivi, et 5 000 d’entre eux sont mobilisés au sein de l’armée israélienne. L’Institut français de Gaza a été bombardé le 3 novembre 2023, et Ahmed Abu Shamla, qui y travaillait depuis vingt ans, a été tué dans un bombardement israélien, alors qu’il s’était réfugié à Rafah avec une partie de sa famille.

Au-delà de ces deux points d’observation, l’ampleur des tragédies en cours permet de comprendre le traumatisme que traversent ces deux sociétés : 1 200 Israéliens sont morts le 7 octobre, ce qui, à l’échelle de la population française, correspondrait à plus de 9 000 morts, en une seule journée. Et 23 000 Palestiniens de Gaza sont morts depuis le 7 octobre, ce qui, là encore, à l’échelle de la France, correspondrait à près de 700 000 morts, en deux mois et demi. Ces chiffres donnent le vertige : oui, ce qui se déroule sous nos yeux est vertigineux et presque indicible, parce que sans précédent.

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Face à un tel déferlement de violence, le débat politique français reste marqué par son inanité binaire : chacun est sommé de choisir son camp, comme si nos positions d’observateur pouvaient se confondre avec celles des familles d’otages israéliens disparus ou des civils palestiniens noyés sous les bombes. Notre rôle, à distance des combats, ne consiste pourtant pas à « jouer à la guerre » en faisant semblant d’être sur le champ de bataille, car nous n’y sommes pas.

L’acte du dénouement

Loin du fracas des armes, nous pouvons et nous devons, au contraire, rester lucides pour analyser froidement ce qui est en train de se jouer : rien de moins que le cinquième et dernier acte du conflit israélo-palestinien, celui du dénouement, qui risque de se conclure par l’anéantissement de l’un ou de l’autre des belligérants.

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