condamnés à nouveau à dix-huit ans de prison, les deux accusés se pourvoient en cassation

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Des gendarmes montent la garde devant la salle d’audience du procès en appel de Mohamed Ghraieb et de Chokri Chafroud au tribunal de Paris, le 22 avril 2024.

Les deux procès de l’attentat qui a fait 86 morts, le 14 juillet 2016 à Nice, resteront comme un cas d’étude dans l’histoire de la justice antiterroriste. En premier lieu, parce que les motivations de son auteur, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, le chauffeur-livreur tunisien qui a précipité son camion sur la foule rassemblée sur la promenade des Anglais, avaient probablement plus à voir avec la psychiatrie qu’avec une réelle conviction idéologique.

Aucune expertise récente n’a pu le confirmer (le tueur a été abattu par la police), mais Mohamed Lahouaiej-Bouhlel présentait tous les symptômes d’un sévère dérèglement psychique : il frappait régulièrement sa femme, l’a violée avec un manche à balai, a menacé de la défenestrer avec ses deux filles, lui a uriné dessus et a, à l’occasion, déféqué sur le plancher… Fait rare dans la litanie des attentats qui ont endeuillé la France, il n’a d’ailleurs laissé aucune revendication de son acte ni la moindre allégeance à un groupe terroriste.

En l’absence du tueur, deux de ses amis, Mohamed Ghraieb, un réceptionniste d’hôtel franco-tunisien de 48 ans, et Chokri Chafroud, un migrant tunisien sans papiers de 44 ans, avaient été condamnés, le 13 décembre 2022, à dix-huit ans de réclusion criminelle pour « association de malfaiteurs terroriste ». Clamant leur innocence, ils avaient fait appel. Ils ont de nouveau été condamnés, jeudi 13 juin, à la même peine, alourdie par une période de sûreté des deux tiers.

« Vas-y remplis le camion »

« Les proches de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel avaient observé sa radicalisation », a expliqué Christophe Petiteau, le président de la cour d’assises spéciale de Paris, en motivant son verdict. Il est vrai que Mohamed Lahouaiej-Bouhlel avait commencé à s’intéresser à la religion musulmane quelques semaines avant son passage à l’acte, même s’il ne la pratiquait pas (il buvait, se droguait, avait un amant et ne priait jamais). Il consommait également des vidéos d’exaction issues de la propagande djihadiste, parmi une multitude de vidéos gore d’actes de torture ou d’accidents de voiture dont il raffolait.

Mais est-ce véritablement sa radicalisation idéologique que ses deux amis auraient dû percevoir, ou sa dangerosité psychiatrique ? Et, surtout, dans quelle mesure ont-ils contribué à alimenter sa pulsion de mort ? Quelques mois avant l’attentat, Chokri Chafroud, qui se trouvait alors en Tunisie, avait envoyé plusieurs messages incriminants à Lahouaiej-Bouhlel sur Facebook. Il s’y lamentait de ses échecs et de la situation économique de son pays : « C’est le bordel la Tunisie », « il n’y a ni travail ni avenir, rien à part l’humiliation »…

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