Ce que l’on sait de l’attaque terroriste dans une salle de concert près de Moscou, qui a fait plus de 130 morts

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De la fumée s’élève au-dessus de la salle de concert Crocus City Hall après une fusillade, dans la banlieue de Moscou, le 22 mars 2024.

Au moins 130 personnes ont été tuées et plus de 100 blessées, vendredi 22 mars au soir, dans une attaque menée par des hommes armés dans une salle de concert à la périphérie de Moscou.

Un assaut mené par plusieurs personnes lourdement armées

Selon les services de secours, cités par l’agence Interfax, un « groupe de deux à cinq personnes non identifiées portant des uniformes tactiques et armées d’armes automatiques » a « ouvert le feu sur les agents de sécurité à l’entrée de la salle de concert » du Crocus City Hall, qui fait partie d’un immense centre d’expositions à Krasnogorsk, au nord-ouest de la capitale russe, puis a « commencé à tirer sur le public », vendredi soir, avant le début d’un concert de rock.

 « Les personnes qui se trouvaient dans la salle se sont allongées sur le sol pour se protéger des tirs, pendant quinze à vingt minutes, après quoi elles ont commencé à sortir en rampant. Beaucoup ont réussi à sortir », a expliqué un journaliste de l’agence de presse publique Ria Novosti.

« Juste avant le début, nous avons tout d’un coup entendu plusieurs rafales de mitraillette et un terrible cri de femme. Puis beaucoup de cris », a raconté à l’Agence France-Presse (AFP) Alexeï, un producteur de musique qui se trouvait dans une loge au moment de l’attaque. « Trois ou quatre rafales seulement, puis encore quelques autres », a-t-il ajouté, joint par téléphone. Depuis les loges où il s’est barricadé avant de s’enfuir, il a pu observer la panique des spectateurs : « Les gens couraient vers la scène, des mouvements de foule terribles. »

Les auteurs auraient ensuite incendié le bâtiment à l’aide d’un « liquide inflammable », a déclaré le Comité d’enquête samedi.

Selon le ministère des situations d’urgence russe, les pompiers sont d’abord parvenus à évacuer une centaine de personnes qui se trouvaient dans le sous-sol de la salle de concert où devait se produire le groupe de rock russe Piknik, dont les membres ont pu être également exfiltrés, a rapporté TASS. Des opérations ont ensuite été lancées, d’après l’agence russe, pour « sauver des personnes se trouvant sur le toit du bâtiment, à l’aide d’équipements de levage ». L’important feu du bâtiment abritant la salle de spectacle « a été quasi circonscrit » par les pompiers, a annoncé Andreï Vorobiov, gouverneur de l’oblast de Moscou, aux premières heures samedi. « Le toit de l’auditorium s’est effondré et le retrait des décombres continue », a-t-il expliqué.

Le bilan de l’attaque s’est alourdi à 133 morts, a annoncé samedi après-midi le Comité d’enquêtes. Dans un communiqué, les enquêteurs ont expliqué avoir trouvé « d’autres corps en déblayant les décombres ». « Les opérations de recherche se poursuivent », ont-ils précisé. « Le travail se poursuivra pendant encore, au minimum, quelques jours », a écrit sur Telegram Andreï Vorobiov, samedi.

L’organisation Etat islamique a revendiqué l’attaque

Un communiqué publié en fin de soirée vendredi par l’organisation Etat islamique (EI) a revendiqué l’attentat. Des combattants de l’EI « ont attaqué un grand rassemblement (…) dans les environs de la capitale russe Moscou », a affirmé l’EI sur l’un de ses comptes Telegram. Le groupe djihadiste, qui a déjà ciblé la Russie à plusieurs reprises, a affirmé que son commando avait ensuite « regagné sa base en toute sécurité ».

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Selon le communiqué de revendication, l’attaque a été menée par l’organisation Etat islamique au Khorassan (EI-K), branche de l’EI implantée en Afghanistan, qui a déjà menacé la Russie par le passé.

« L’attaque a été menée par quatre combattants de l’EI armés de mitrailleuses, d’un pistolet, de couteaux et de bombes incendiaires », a complété l’organisation dans un message publié sur l’un de ses comptes Telegram.
L’EI a affirmé que l’attaque s’inscrivait « dans le contexte (…) de la guerre faisant rage » entre le groupe et « les pays combattant l’islam ».

L’EI, que Moscou combat en Syrie et qui est actif aussi dans le Caucase russe, a déjà commis des attentats en Russie depuis la fin des années 2010. Mais le groupe n’y avait jamais revendiqué une attaque d’une telle ampleur.

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Moscou affirme que les assaillants ont été arrêtés

Le Kremlin a annoncé samedi « l’arrestation de onze personnes, dont quatre terroristes impliqués dans l’attentat ». Ces quatre personnes soupçonnées d’être les auteurs de l’attaque – des « citoyens étrangers » selon les autorités – ont été arrêtées dans l’oblast de Briansk, frontalière de l’Ukraine et de la Biélorussie, a ensuite précisé le Comité d’enquête.

Sans mentionner la revendication de l’EI, le FSB a affirmé que les suspects avaient des « contacts du côté ukrainien » et comptaient fuir dans ce pays. Les autorités n’ont avancé aucune preuve de ces liens supposés, dont la nature n’a pas été précisée. L’Ukraine a fermement nié tout lien avec l’attaque et affirmé que la Russie, dont elle combat l’offensive depuis deux ans, cherchait à lui faire porter le blâme.

Des agents des forces de l’ordre russes montent la garde près de la salle de concert Crocus City Hall à la suite d’une fusillade, dans la banlieue de Moscou, le 22 mars 2024.

Vladimir Poutine promet de « punir » les responsables, sans réagir à la revendication de l’EI

Lors d’un allocution télévisée, samedi, Vladimir Poutine a dénoncé un acte « terroriste barbare » et déclaré un jour de deuil national dimanche. Le président russe a promis samedi de « punir » les responsables de l’attaque en ne mentionnant pas la revendication du groupe djihadiste Etat islamique (EI), affirmant seulement que les assaillants avaient été arrêtés en chemin vers l’Ukraine.

Vladimir Poutine s’était entretenu dans la nuit avec les responsables des forces de l’ordre et des services de secours. Selon les agences de presse russes citant le Kremlin, le président a reçu les rapports du directeur du FSB, du comité d’enquête, de la garde nationale, ainsi que des ministres de l’intérieur, de la santé et des situations d’urgence.

Le maire de Moscou, Sergueï Sobianine, a annoncé l’annulation de tous les événements publics. Les principaux musées et théâtres de la capitale ont annoncé leur fermeture. Des mesures de sécurité renforcées ont été mises en place, selon la télévision russe, notamment dans les aéroports.

L’ombre du terrorisme planait sur la Russie

La Maison Blanche a déclaré, vendredi soir, avoir récemment mis en garde la Russie contre une attaque terroriste à Moscou. « Au début de ce mois, le gouvernement américain disposait d’informations sur un projet d’attentat terroriste à Moscou, visant potentiellement de grands rassemblements, y compris des concerts, et Washington a partagé ces informations avec les autorités russes », a déclaré Adrienne Watson, porte-parole du conseil de sécurité nationale américain.

Une version que Moscou n’a pas confirmée. « Si les Etats-Unis disposent ou disposaient de données fiables à ce sujet, ils doivent les transmettre immédiatement à la partie russe », avait réagi Mme Zakharova vendredi soir à propos des mises en garde adressées le 7 mars par l’ambassade américaine en Russie à ses citoyens concernant des risques d’attentats à Moscou. L’ambassade, suivie par son homologue britannique, appelait notamment à « éviter les grands rassemblements, y compris les concerts », au cours des quarante-huit heures suivantes. Récemment, le 19 mars, Vladimir Poutine évoquait encore cet avertissement en dénonçant « un chantage explicite et une volonté de déstabiliser et d’effrayer notre société ».

Ce même 7 mars, le FSB avait assuré avoir déjoué un projet d’attentat contre une synagogue moscovite, attribué à des terroristes afghans liés à l’organisation Etat islamique. Quelques jours plus tôt, en Ingouchie (Caucase du Nord), les forces de sécurité avaient mené l’assaut durant une nuit entière contre une maison de la ville de Karaboulak, tuant « six combattants », selon les autorités.

En 2002, des combattants tchétchènes avaient pris en otage 912 personnes dans le théâtre moscovite de la Doubrovka pour réclamer le retrait des troupes russes de Tchétchénie. La prise d’otages s’était achevée par un assaut des forces spéciales et la mort de 130 personnes, la quasi-totalité d’entre elles asphyxiées par le gaz utilisé par les militaires.

Le Monde avec AFP

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