Au Venezuela, « la communauté internationale a un rôle très important à jouer »

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Manifestation pour protester contre l’élection de Nicolas Maduro, à l’appel de l’opposition, à Caracas, le 8 août 2024.

Au Venezuela, le régime de Nicolas Maduro ne paraît pas disposé à la négociation. Malgré les appels réitérés d’une grande partie de la communauté internationale à publier les procès-verbaux du scrutin, le régime s’arc-boute sur la proclamation, par les autorités électorales, de la victoire du chavisme à la présidentielle du 28 juillet, sans en fournir les preuves, et réprime toute forme de contestation. Phil Gunson, analyste basé à Caracas de l’organisation de prévention des conflits, International Crisis Group, analyse pour Le Monde les possibles scénarios de sortie de crise.

Quelles sont les racines de cette crise politique ?

Il faut remonter aux législatives de 2015. Pour la première fois depuis l’arrivée au pouvoir du chavisme [avec l’élection d’Hugo Chavez en 1999], l’opposition a remporté la majorité, et même les deux tiers des sièges au Parlement. C’était le moment idéal pour arriver à ce qu’en France on appellerait une cohabitation. Mais cette opportunité n’a pas été saisie.

Il y a eu des erreurs des deux côtés, mais le principal responsable est le gouvernement de Nicolas Maduro. Celui-ci a tout simplement refusé d’accepter la réalité, celle de la présence de deux forces antagonistes qui devaient se mettre d’accord sur la gouvernabilité du pays. Il a reconnu l’élection, mais il a ensuite tout fait pour que ce résultat n’ait aucune conséquence dans la pratique, en retirant tous les pouvoirs au Parlement. A partir de là, la crise s’est aggravée, jusqu’à l’expérience de Juan Guaido en 2019.

A la présidentielle de 2018, Nicolas Maduro est réélu mais sa victoire est contestée par l’opposition et le chef de celle-ci, Juan Guaido, s’autoproclame président par intérim. Il est reconnu par les Etats-Unis et l’Union européenne. Il crée un cabinet parallèle, nomme des ambassadeurs, etc. Mais cette expérience est un échec. Pourquoi ?

Parce qu’elle a été mal conçue. En tant que président de l’Assemblée nationale, Juan Guaido avait acquis une très grande popularité. Beaucoup ont cru que cette autoproclamation comme président serait une voie rapide vers un changement de gouvernement parce qu’il avait l’appui des Etats-Unis. Beaucoup pensaient que les jours de Maduro au pouvoir étaient comptés, qu’il n’allait pas pouvoir résister aux sanctions internationales et à l’isolement diplomatique.

Mais Maduro avait des motifs et des outils pour pouvoir résister. D’abord, le monopole de la violence, des armes. Ensuite, il avait le soutien de pays experts dans l’art de se moquer des sanctions : Cuba, la Russie… Maduro a pu monter une sorte d’économie parallèle pour faire fonctionner son gouvernement, assurer la sécurité de ses proches et satisfaire l’armée, alors que son pays vivait une urgence humanitaire – une situation que les sanctions n’ont pas créée, mais qu’elles ont exacerbée.

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