Devant le Parlement marocain, à Rabat, Emmanuel Macron a estimé, mardi 29 octobre, que le « partenariat d’exception renforcé » conclu la veille avec le roi Mohammed VI devait notamment porter sur « l’immigration illégale et la nécessité d’une coopération naturelle et fluide en matière consulaire ». Il faisait allusion à la volonté de la France que le Maroc reprenne plus facilement ses ressortissants que les autorités françaises décident d’expulser. « Nous avons besoin de davantage encore de résultats », a-t-il déclaré, évoquant aussi la « lutte contre les trafics de toute nature », dont le « narcotrafic », qui « nécessite une coopération judiciaire très étroite et encore plus rapide ».
Le sujet de l’immigration est un irritant traditionnel entre Paris et Rabat, alors que le ministre de l’intérieur français Bruno Retailleau, qui doit tenir une conférence de presse avec son homologue marocain Abdelouafi Laftit, souhaite notamment conditionner la politique de visas à la délivrance des laissez-passer consulaires, documents indispensables pour renvoyer des étrangers dans leur pays d’origine. Début octobre, le ministre avait cité l’exemple du Maroc : en 2023, 238 000 visas ont été accordés aux ressortissants marocains pour 1 680 retours forcés sur leur sol. Le royaume est selon lui « un pays sûr » où l’on peut « accélérer un certain nombre de réadmissions ».
Sur le Sahara occidental, autre enjeu diplomatique − qui oppose Rabat et Alger, Emmanuel Macron a réaffirmé solennellement que « le présent et l’avenir » du Sahara occidental « s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine », suscitant les applaudissements nourris des élus.
« Cette position n’est hostile à personne », a assuré le chef de l’Etat dans une réponse aux critiques de l’Algérie, qui soutient les indépendantistes sahraouis du Front Polisario dans ce territoire disputé. « Et je le dis ici aussi avec beaucoup de force, nos opérateurs et nos entreprises accompagneront le développement de ces territoires au travers d’investissements, d’initiatives durables et solidaires au bénéfice des populations locales. »
La France « a évité l’effondrement de plusieurs Etats » au Sahel
Après la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté du Maroc sur ce territoire, Rabat a multiplié les pressions sur la France pour qu’elle en fasse autant. Le 30 juillet, Emmanuel Macron a fini par considérer dans une lettre adressée au roi Mohammed VI que l’avenir du Sahara occidental s’inscrivait « dans le cadre de la souveraineté marocaine », ouvrant la voie à un réchauffement avec Rabat et par ricochet à une nouvelle crise avec Alger. Ce réalignement de la position française avait ouvert la voie à cette visite d’Etat, maintes fois repoussée jusque-là.
Au-delà du territoire disputé, Emmanuel Macron a évoqué la nécessité d’aboutir dans la région du Sahel à « une stabilité respectueuse des peuples », plaidant pour des « projets de développement pour la jeunesse ». Trois pays du Sahel, Niger, Mali et Burkina Faso, dirigés par des juntes, ont rompu avec la France, ex-puissance coloniale.
La France « a été accusée par certains de tous les maux, bien injustement, car pendant une décennie, elle a évité l’effondrement de plusieurs Etats face au terrorisme et à des califats territoriaux », a déploré le président français. Il a assuré vouloir, « avec humilité », « bâtir une stratégie partenariale nouvelle » dans la région sahélienne.
Emmanuel Macron a également proposé au roi du Maroc Mohammed VI de signer un nouveau « cadre stratégique » bilatéral en 2025 à Paris à l’occasion du 70e anniversaire de la Déclaration qui scella l’indépendance du Maroc de la France. Après la déclaration de la Celle-Saint-Cloud, le 6 novembre 1955, cet accord pourrait être signé à l’occasion d’une « visite d’Etat en France que sa Majesté [Mohammed VI] a accepté » d’effectuer, a-t-il dit.
L’Elysée a fait savoir que plus de 10 milliards d’euros, répartis en 22 accords, de contrats commerciaux et d’engagements financiers seront annoncés à l’issue de cette première visite d’Etat du président français au Maroc.