A Eurosatory, inquiétude sur l’avenir de la loi de programmation militaire

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Le nouveau char Leopard 2 A-RC 3.0, fabriqué par KNDS, au salon Eurosatory, à Villepinte (Seine-Saint-Denis), le 17 juin 2024.

Il y a les alarmistes, les résignés et les pragmatiques. Dans les allées du salon Eurosatory, grand rendez-vous bi-annuel des fabricants d’armements terrestres et aéroterrestres, qui se tient à Villepinte (Seine-Saint-denis), du 17 juin au 21 juin, rares sont les participants, industriels ou officiers, à rester impassibles face à l’onde de choc que constitue la dissolution de l’Assemblée nationale. Au cœur des inquiétudes : l’avenir de la loi de programmation militaire (LPM), dont le chef de l’Etat avait fait la clé de voûte de la remontée en puissance des armées dans un contexte international de plus en plus dégradé.

« La LPM est morte ! », lâche un général rodé aux subtilités du dialogue politico-militaire, sans illusion sur l’avenir de ce texte qui planifie les dépenses des armées pour la période 2024-2030. « On en prend pour deux ans au moins d’instabilité », déplore avec fatalisme un autre haut gradé qui, comme beaucoup, a fait une bonne part de sa carrière par temps de disette budgétaire et voulait croire aux 413 milliards d’euros promis avec la LPM adoptée en 2023 pour les sept années suivantes (contre 295 milliards pour la LPM précédente).

Non contraignante, cette loi de programmation peut en effet être remise en cause chaque année lors des arbitrages budgétaires. Par le passé, les LPM ont d’ailleurs rarement été respectées, avec des investissements « décalés » d’année en année, une astuce souvent employée pour réaliser des économies. « Il n’y a rien de gravé dans le marbre, une LPM, c’est indicatif, et le Parlement n’est pas tenu de la suivre, rappelle François Ecalle, spécialiste des finances publiques. Toute la question est de savoir si le nouveau gouvernement voudra faire des économies sur la défense. »

« Char et avion du futur »

De fait, depuis son élection, Emmanuel Macron s’enorgueillissait d’avoir réussi à la valider « à l’euro près ». En février, l’armée a été épargnée par le décret annulant 10 milliards d’euros de crédits. Mais les débats de l’automne pour l’adoption de la loi de finance 2025 s’annonçaient déjà périlleux même avant la dissolution et l’éventuelle redéfinition des priorités budgétaires. Par ailleurs, les grands projets comme le « char du futur » (Main Ground Combat System ou MGCS, dans le jargon) et l’« avion du futur » (Système de combat aérien du futur ou SCAF), déjà fragilisés, pourraient en faire les frais.

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Le contexte politique préoccupe particulièrement les industriels les plus aux avant-postes du soutien à l’Ukraine. Comme KNDS France (ex-Nexter), fabricant du canon Caesar. Sous pression de l’exécutif, KNDS a mis les bouchées doubles pour accélérer la production du Caesar. De deux canons produits par mois avant la guerre, l’entreprise est passée à six, et devrait atteindre douze systèmes d’artillerie par mois en 2025. La production d’obus associés a aussi augmenté. Le tout a nécessité l’embauche de plus de 10 % de personnels sur les deux sites concernés et une avance de trésorerie d’environ 300 millions d’euros, indique-t-on chez KNDS.

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