En Argentine, l’incompétence du gouvernement transforme la crise alimentaire en scandale politique

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Des membres d’organisations sociales et de cantines populaires manifestent contre le gouvernement du président argentin Javier Milei devant un dépôt alimentaire appartenant au ministère du capital humain, à Villa Martelli, dans la banlieue de Buenos Aires, le 29 mai 2024.

Des palettes entières de lentilles, de lait en poudre, de farine et autres produits de base emmagasinés dans des entrepôts. Depuis plusieurs jours, les images de ces stocks impressionnants inondaient les écrans de télévision argentins. La population découvrait, stupéfaite, que près de 6 000 tonnes d’aide alimentaire, destinée à être distribuée aux plus démunis, étaient entreposées dans des hangars depuis bientôt six mois alors que la crise économique s’aggrave.

Mardi 4 juin, à la suite d’une saga judiciaire et médiatique, les premiers camions de l’armée ont finalement été missionnés pour répartir les aliments proches de leur date de péremption, après plusieurs semaines de refus de la part du gouvernement de Javier Milei. Pour ne rien arranger, un possible scandale de corruption au sein du ministère chargé de l’aide sociale a été mis au jour par les médias, faisant trembler le titulaire du plus gros portefeuille ministériel de l’administration Milei.

Depuis l’arrivée au pouvoir du nouveau président argentin, le 10 décembre 2023, les organismes sociaux, principaux intermédiaires dans la distribution des denrées à travers leurs cantines populaires, sont dans le collimateur. Le président d’extrême droite accuse leurs dirigeants d’être des « gérants de la pauvreté » et de détourner l’aide à leur profit.

Sandra Pettovello, ministre chargée de l’énorme ministère du capital humain – qui regroupe les ex-portefeuilles du développement social, de l’éducation, du travail, de la culture et des femmes, genre et diversité –, s’est donc lancée dès son arrivée dans un vaste audit des programmes sociaux. En attendant les conclusions, les cantines populaires gérées par les associations, qui voient pourtant les files de nécessiteux grossir à mesure que la situation économique se détériore, ne reçoivent plus aucun produit alimentaire.

« C’est une mesure idéologique, dogmatique. Dans son calcul, le gouvernement a donné la priorité à son combat contre les “intermédiaires” plutôt qu’à la possibilité que l’on sache qu’il détenait des aliments sur le point d’être périmés », explique le politologue spécialiste des organisations sociales Francisco Longa, qui y voit une « insensibilité vis-à-vis des personnes les plus touchées par la crise ».

Explications douteuses

Une étude de l’Université catholique argentine publiée le 3 juin indique que 55,5 % de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté, contre 44,7 % au dernier trimestre 2023. Conséquence de la crise, la consommation de lait a par ailleurs chuté de près de 20 %, selon l’Institut pour le développement agro-industriel argentin.

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