
En quelques semaines, Donald Trump a torpillé l’Alliance atlantique. Il a démoli politiquement le pacte de défense collective qui unissait Américains et Européens depuis 1949. Les Etats-Unis n’entendent plus appuyer leurs alliés dans la défense de l’Ukraine. Face à l’agression, ils sonnent le retrait, la paix aux conditions de Moscou. Si l’on comprend bien le raisonnement stratégique qui sous-tend cette décision, Washington estime que la solidarité transatlantique ne sert plus ses intérêts : la priorité n’est pas le sort de l’Ukraine, mais la normalisation avec la Russie de Vladimir Poutine.
Les trésors d’amitié accumulés soixante-quinze ans durant, la densité des échanges économiques de part et d’autre de l’océan, l’appartenance commune – jusqu’à présent – au camp des démocraties libérales, la gratitude des Européens pour la victoire de 1945, envolé tout cela. Pas de sentiment, pas de mémoire commune et surtout pas de morale quand il s’agit de conclure un deal avec le Kremlin. Il en ira de même quand Trump en passera un autre, de deal, avec la Chine de Xi Jinping. Les Etats sont des monstres froids. Le général avait raison : un jour, les Américains partiront, disait de Gaulle. Un jour, l’ordre du monde changera. Nous y sommes.
Les Etats-Unis n’ont pas besoin de dénoncer formellement l’OTAN. Ils ne parlent pas, ou pas encore, de fermer les bases américaines en Europe : ils demandent – à juste titre – que le Vieux Continent contribue plus à leur financement. Dans les années qui viennent, sans doute diminueront-ils leurs forces sur place – passées de 30 000 soldats en 2014 à plus de 80 000 aujourd’hui. Mais Trump a désarmé politiquement l’OTAN, il l’a vidée de ce qui fait la force d’une alliance de défense collective : la fiabilité.
Les alliés des Américains estiment que leur sécurité se joue en partie en Ukraine, pays non-membre de l’OTAN. C’est particulièrement vrai des Baltes, des Etats du centre et de l’est du Vieux continent, des Scandinaves aussi. Ils savent que Poutine a violé tous les traités signés par la Russie et garantissant l’intégrité des frontières en Europe. Ils prennent le président russe au sérieux quand il écrit que l’Ukraine n’existe pas, quand il sabote les ambitions europhiles de la Géorgie ou quand Moscou menace la Moldavie. Ils estiment, à juste titre, que l’expansionnisme poutinien ne se satisfera pas du Donbass et de la Crimée, mais vise Kiev : un gouvernement ukrainien à la botte du Kremlin.
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