récit d’une course effrénée vers la catastrophe

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Une manifestation, le 3 novembre 2024, pour réclamer le droit à un logement décent et rendre hommage aux victimes de l’effondrement des deux immeubles de la rue d’Aubagne le 5 novembre 2018, à Marseille.

Une municipalité désintéressée de la lutte contre l’habitat indigne, un adjoint au maire peu investi préférant briller aux côtés des marins-pompiers plutôt qu’avec ses agents chargés des immeubles menaçant ruine, des experts qui omettent les fondations des bâtiments dans leur diagnostic, un syndic soupçonné de « jouer la montre »… Petites et grosses erreurs, incompétences légères et majeures voire soupçons de cupidité se sont empilés cette semaine devant le tribunal correctionnel de Marseille, qui juge les éventuelles responsabilités dans les effondrements des immeubles de la rue d’Aubagne, qui ont fait huit morts le 5 novembre 2018.

Ecartant un « c’est-la-faute-à-pas-de-chance » esquissé à l’origine par certains, les juges d’instruction avaient conclu à un drame né d’occasions manquées et d’alertes lancées dans le vide. Mais le procès va jusqu’à dessiner une inéluctable course vers la catastrophe, chacun y donnant son coup d’accélérateur.

« Il faut attendre huit morts pour réfléchir à l’organisation de la mairie dans la lutte contre l’habitat indigne », souffle le président Pascal Gand alors que le tribunal examine le fonctionnement du Service de prévention et de gestion des risques (SPGR), chargé de la sécurité des immeubles et des arrêtés de péril grave et imminent. « La question de l’habitat indigne n’était pas une priorité municipale », déplore Arlette Fructus (Parti radical), entendue comme témoin.

Durant les deux derniers mandats de Jean-Claude Gaudin, elle était adjointe au maire chargée du logement. Après le drame de Noailles, elle s’était retrouvée aux avant-postes de la gestion de crise. « Jean-Claude Gaudin s’occupait des élections à venir, moi je cherchais des solutions au relogement » de centaines de Marseillais « sortis » brutalement de chez eux après le 5 novembre 2018, explique-t-elle. Arlette Fructus avait remis sa démission en janvier 2020. Trois ans plus tôt, lorsqu’elle avait mis sur la table le sujet de l’habitat indigne, « on » lui avait répondu que cela n’existait pas à Marseille.

Effectifs peau de chagrin

Julien Ruas (LR) est, lui, resté fidèle à Jean-Claude Gaudin. Ce directeur de maison de retraite qui consacrait vingt à trente heures par semaine à ses fonctions d’adjoint chargé des marins pompiers et de la prévention des risques urbains, est jugé pour homicides et blessures involontaires, ayant notamment renoncé, selon les juges d’instruction, à utiliser ses pouvoirs de police administrative en matière d’habitat indigne. Ses déclarations brossent le portrait d’un élu attentiste et extérieur à cette problématique, disant ne se préoccuper que des immeubles sur lesquels un signalement arrivait en mairie. « Compte tenu des remontées d’informations, est-ce que ce n’est pas votre rôle de mettre en place un plan d’action, de ne pas être dans l’attente des signalements mais d’être proactif ? », l’interpelle le tribunal. « Je m’occupe des immeubles en péril, pas des immeubles en général », répond Julien Ruas.

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