
Le nouveau premier ministre canadien, Mark Carney, est entré en fonctions, vendredi 14 mars, avec la lourde tâche de prendre les rênes d’un pays choqué et anxieux d’être devenu la cible privilégiée des attaques de Donald Trump.
Tournant la page de la décennie Justin Trudeau, le Parti libéral au pouvoir mise maintenant sur l’expérience de banquier central Mark Carney pour rassurer les Canadiens confrontés à une guerre douanière qui pourrait faire vaciller l’économie.
M. Carney, qui fêtera ses 60 ans dimanche, est un novice en politique, il n’a jamais été député ou ministre. Mais il n’aura pas le droit à une lune de miel et récupère une feuille de route particulièrement chargée puisqu’il devra aussi tenter de mener son parti pour les prochaines élections.
« C’est un moment crucial pour notre pays », a-t-il reconnu il y a quelques jours, parlant de « jours sombres ». Mais « que les Américains ne s’y trompent pas. Dans le commerce comme au hockey, le Canada gagnera », a-t-il promis, en référence à la rivalité sportive entre les deux pays.
« Prêt à s’asseoir avec le président Trump »
Les menaces posées par Donald Trump dominent la vie politique canadienne depuis des semaines et devraient rester le principal sujet de la campagne électorale à venir. Le président américain, qui a lancé une guerre commerciale avec son voisin à coups de droits de douane, ne cesse par ailleurs de répéter que la « seule chose sensée » à faire pour le Canada serait de rejoindre les Etats-Unis d’Amérique. « Ce serait le pays le plus incroyable visuellement. Si vous regardez une carte, vous verrez qu’ils ont tracé une ligne artificielle entre le Canada et les Etats-Unis », a-t-il déclaré jeudi.
Mark Carney, qui a prêté serment en tant que 24e premier ministre du Canada devant la gouverneure générale Mary Simon, a dit mercredi qu’il était « prêt à s’asseoir avec le président Trump » pour discuter des échanges commerciaux. Mais cela ne peut se faire qu’en « respectant la souveraineté canadienne », a-t-il ajouté.
Cet économiste, qui a fait fortune en tant que banquier d’affaires chez Goldman Sachs, avant de diriger la Banque du Canada, puis celle d’Angleterre, promet de s’appuyer sur son expérience des crises. Mark Carney « arrive à un bon moment », estime Félix Mathieu, politologue à l’université de Winnipeg. « Les gens semblent avoir confiance en lui pour affronter Donald Trump. »
Le Parti libéral et les conservateurs au coude-à-coude
Ces dernières semaines, il s’est clairement efforcé de se démarquer de Justin Trudeau, se présentant comme centriste. Dans une vidéo jeudi, ce dernier – qui avait déclenché une vraie Trudeaumania à son arrivée au pouvoir en 2015 – a déclaré être « fier d’avoir été au service d’un pays où les gens se battent pour ce qui est juste » et « se montrent toujours à la hauteur ».
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Selon des sources gouvernementales, des élections législatives devraient être annoncées par le nouveau premier ministre dans les jours qui viennent et se tenir fin avril ou début mai. Un défi pour Mark Carney qui n’a pas d’expérience politique et qui devra s’appliquer à ne pas incarner qu’« une élite économique, autant face à Donald Trump que face à l’électorat canadien », estime Frédéric Boily, professeur de science politique à l’université de l’Alberta.
Au moment de la démission de Justin Trudeau, début janvier, les libéraux semblaient promis à une lourde défaite électorale. Les conservateurs de Pierre Poilievre étaient alors crédités de plus de 20 points d’avance dans les sondages. Mais toutes les cartes ont été rebattues depuis et les deux partis sont maintenant au coude-à-coude dans les intentions de vote.
Mark Carney a affirmé que la lutte contre le changement climatique serait une priorité absolue, mais a prévu de supprimer la taxe carbone de M. Trudeau, qui « divise » les particuliers et les familles. Il a conservé le noyau de l’équipe de Justin Trudeau, notamment les ministres chargés des négociations avec Washington, la ministre des affaires étrangères, Mélanie Joly, et le ministre des finances, Dominic LeBlanc.