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Convoité par les Etats-Unis de Donald Trump et la Chine de Xi Jinping, le Groenland a adopté en urgence, le 4 février, une loi destinée à « sauvegarder l’intégrité politique » du territoire autonome danois en limitant les donations étrangères aux partis politiques et aux particuliers, en vue des élections législatives du 11 mars. Début février, la Pologne présentait, de son côté, un nouveau programme baptisé « Parapluie électoral », visant à protéger l’élection présidentielle dont le premier tour est prévu le 18 mai. « L’activité en ligne sera surveillée d’une manière qui empêche toute ingérence étrangère », assurait le ministre des affaires numériques, Krzysztof Gawkowski, en désignant explicitement la Russie. Prise en étau entre l’ingérence russe et celle d’Elon Musk en faveur du parti d’extrême droite AfD, l’Allemagne dit avoir testé les plateformes numériques X, TikTok et YouTube, en amont des élections fédérales du dimanche 23 février, afin de prévenir d’éventuelles menaces sur le déroulement du scrutin. Partout en Europe, la panique monte.
Fini le temps où des élections de façade dans les autocraties attiraient les regards ! C’est désormais vers le cœur des systèmes démocratiques, visés par des manipulations numériques de plus en plus sophistiquées et capables de modifier des votes, que se porte l’attention. L’annulation du second tour de l’élection présidentielle en Roumanie, décidée par la Cour constitutionnelle le 6 décembre 2024, a créé un électrochoc. Pour la première fois, un scrutin majeur a été brutalement interrompu, après l’émergence d’un candidat prorusse dans un pays pourtant foncièrement pro-européen. Propulsé en tête des résultats au soir du premier tour, le 24 novembre 2024, avec 23 % des votes (plus de 2 millions), Calin Georgescu, 62 ans, partisan de l’arrêt total de l’aide roumaine à l’Ukraine, n’avait participé à aucun débat, ni même, selon ses dires, investi le moindre leu – la monnaie nationale – dans la campagne.
La popularité subite de celui qui aime imiter Vladimir Poutine en s’affichant en photo en train de pratiquer le judo, de nager ou de monter à cheval doit tout aux réseaux sociaux, et en particulier à l’application TikTok, très populaire dans le pays, avec 9 millions d’utilisateurs… pour 19 millions d’habitants. Selon les services roumains de renseignement, la combinaison de vidéos associées à des mots-clés et relayées – moyennant une rémunération dissimulée – par plus d’une centaine d’influenceurs totalisant plus de 8 millions d’abonnés actifs avait atteint un tel niveau que, entre le 13 et le 26 novembre 2024, le nom « Georgescu » se plaçait à la 9e place mondiale des principales tendances en matière de promotion de contenus. Près de 25 000 comptes TikTok, soutenus par l’algorithme de recommandation, étaient devenus particulièrement actifs durant ces deux semaines.
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