Les salariés de la protection de l’enfance dans la rue pour dénoncer l’état de « délabrement inédit » du secteur

4543


Manifestation nationale à l’appel du nouveau collectif Les 400 000, réunissant des associations, institutions, fédérations et acteurs de la société civile engagés pour la protection de l’enfance, à Paris, le 25 septembre 2024.

Educateurs spécialisés, chefs de service, psychologues, directeurs de foyers de l’enfance… malgré la pluie battante, ils étaient quelques centaines, mercredi 25 septembre, à s’élancer de l’esplanade des Invalides, à Paris, en direction de la place du Panthéon, afin d’alerter sur l’état de « délabrement inédit » de la protection de l’enfance. Une mobilisation rare pour ce secteur, dont la mission est d’accompagner les enfants maltraités, avec un éventail d’actions allant du soutien aux familles jusqu’au placement.

Signe de la gravité de la crise actuelle, environ soixante-dix organisations se sont rassemblées à l’appel de la Convention nationale des acteurs de la protection de l’enfance (Cnape) au sein d’un nouveau collectif, Les 400 000, en référence au nombre de jeunes concernés par une prise en charge à l’aide sociale à l’enfance – ils sont 380 000. « Nous partageons tous un diagnostic commun, celui que nous ne sommes plus en mesure de répondre aux besoins croissants des enfants suivis en protection de l’enfance », résume Pierre-Alain Sarthou, le directeur général de la Cnape. Il évoque pêle-mêle « la pénurie de professionnels », la non-exécution des mesures judiciaires ordonnées par des juges des enfants « chargés chacun de 350 à 400 dossiers », ainsi que le défaut d’application des lois sur la protection de l’enfance, en particulier ce qui touche au suivi des jeunes majeurs, très aléatoire malgré une obligation formulée dans une loi de 2022.

Des défaillances qui résonnent avec les récits de travailleurs sociaux croisés dans le cortège, hérissé de banderoles sur lesquelles on pouvait lire « Educateurs au rabais, enfants en danger ». « Aujourd’hui, les foyers censés accueillir les enfants en danger dans leurs familles n’arrivent plus à recruter des éducateurs. Il y a un turn-over énorme, plus personne ne veut faire ce boulot, qui est difficile, mal payé, mal considéré », explique Laurence Chanclud, éducatrice spécialisée dans un service de milieu ouvert à Paris, venue manifester. Sa collègue Vanessa Stainvurcel, à ses côtés, en quinze années d’exercice, observe « l’impact de la dégradation terrible de la psychiatrie » sur les enfants et les familles qu’elle accompagne, « de plus en plus nombreux à avoir des problèmes psychiatriques lourds, ce qui nous met en grande difficulté dans nos accompagnements ».

« On ne laissera pas faire »

Mourad (il n’a pas souhaité donner son nom), éducateur dans une maison d’enfants à caractère social – un autre nom pour les foyers –, « change de collègues sans arrêt ». « Les jeunes ne veulent pas rester, alors on a des intérimaires qui viennent, qui repartent… Comment voulez-vous créer un lien avec les gamins dans ces conditions ? », s’inquiète-t-il.

Il vous reste 29.01% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.



Source link