

Le Parlement européen a annoncé, vendredi 14 mars, priver temporairement d’accès à ses bâtiments de Bruxelles et de Strasbourg tous les lobbyistes et les représentants de Huawei. Le groupe chinois est soupçonné de faits de corruption au sein de l’institution de l’Union européenne pour défendre ses intérêts.
Il s’agit d’une « mesure de précaution » avec « effet immédiat », a précisé une porte-parole du Parlement jointe par l’Agence France-Presse (AFP). Le groupe chinois compte actuellement neuf représentants accrédités, selon le registre de transparence de l’institution, et donc autorisés à rencontrer des eurodéputés.
La décision intervient au lendemain d’une vague de perquisitions et d’interpellations dans une enquête pour corruption menée par la justice belge. Le parquet fédéral belge a fait état jeudi de 21 perquisitions menées à travers la Belgique, et de trois autres sollicitées au Portugal.
Dans le collimateur des enquêteurs figureraient des lobbyistes actifs pour Huawei et des assistants parlementaires soupçonnés d’avoir relayé des demandes d’intervention auprès d’eurodéputés. Il y a eu plusieurs interpellations, jeudi, dont l’une en France d’un suspect ciblé par un mandat d’arrêt européen émis par la justice belge.
Mais aucune identité n’a été précisée, ni le nombre précis de personnes interpellées en vue d’être auditionnées à Bruxelles. Le suspect arrêté en France a été écroué dans l’attente de sa comparution mercredi prochain à Paris devant la chambre des extraditions, a rapporté vendredi une source proche du dossier à l’AFP.
Huawei a refusé de commenter, vendredi, les interdictions d’accès, renvoyant à un précédent communiqué dans lequel il disait prendre l’affaire au sérieux. La nuit dernière, le groupe avait assuré avoir une politique de « tolérance zéro » envers la corruption.
Selon le parquet, la corruption aurait été pratiquée « régulièrement » et « très discrètement » depuis 2021, « sous couvert de lobbying commercial ». Elle aurait pris différentes formes, comme des rémunérations de prises de position politiques ou encore « des cadeaux démesurés » comme des frais de bouche et de voyage, ou des invitations régulières à des matchs de football.
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Jeudi, des scellés ont été placés sur les portes de plusieurs bureaux utilisés par des assistants parlementaires à la fois à Bruxelles et à Strasbourg. Parmi ces bureaux figure celui utilisé par les assistants d’un eurodéputé italien du parti Forza Italia. Cette formation associée au groupe PPE (droite) a assuré qu’elle coopérait avec l’enquête, soulignant qu’aucun de ses membres n’avait jamais profité d’« invitations en Chine » ou « au stade ».
Par ailleurs un ex-eurodéputé slovène, dont le nom a circulé dans la presse comme potentiel suspect, a démenti ces accusations.
Le risque le plus élevé
Interrogé par les médias slovènes, Franc Bogovic, ancien élu du PPE, a admis avoir été invité par le groupe chinois à des conférences et avoir participé avec lui à un projet autour de l’Internet à haut débit, mais il a assuré n’avoir aucun comportement illégal à se reprocher.
En 2023, Bruxelles avait décrit le géant des télécommunications chinois comme présentant le risque le plus élevé pour les pays de l’UE parmi tous les fournisseurs de 5G, appelant les Etats membres à exclure ses équipements de leurs réseaux mobiles.
L’an dernier, l’Allemagne avait annoncé son intention d’interdire d’ici à fin 2026 au plus tard la présence dans ses réseaux 5G de composants et de technologies des groupes chinois Huawei et ZTE. Berlin avait mis en avant des raisons de « sécurité ».