
Lorsque, en 2017, le président français, Emmanuel Macron, a appelé à renforcer l’indépendance de la défense de l’Europe, notamment en réduisant sa dépendance vis-à-vis de Washington, ses appels ont été considérés dans de nombreux Etats européens comme un affront à l’Alliance transatlantique. Mais depuis l’invasion russe de l’Ukraine en 2022, et au vu des dernières déclarations de l’administration du président américain, Donald Trump, les Européens se disent de plus en plus qu’ils auraient, en effet, été mieux avisés de consolider la défense européenne afin de ne plus compter sur les Etats-Unis pour l’assurer.
Au lieu de prendre au sérieux les multiples signaux d’alerte – que ce soit le pivot de Barack Obama [président des Etats-Unis de 2009 à 2017] vers l’Asie, l’élection de Trump en 2016, le chaotique retrait américain d’Afghanistan, l’invasion russe de l’Ukraine ou les tensions avec l’administration du précédent président américain, Joe Biden, sur une accession de l’Ukraine à l’OTAN –, les Européens sont collectivement retournés à leur torpeur. Même s’ils ont relevé les défis qui se sont posés à eux avec un degré d’engagement variable (l’effort européen dans le dossier ukrainien doit être cependant souligné), ils ont fini par se rendormir profondément, rassurés par l’idée que Washington resterait un partenaire sur lequel l’Europe pourrait compter pour assurer sa sécurité. Même si ses demandes lui coûtent quelques efforts supplémentaires.
L’actualité montre cependant que cette vision de l’ordre de sécurité européen comporte une erreur politique et conceptuelle d’importance : elle considère la coopération transatlantique comme un élément constitutif de l’ordre européen, en oubliant les tensions ou même les conflits ouverts entre alliés. Aussi, petit à petit, les Européens se sont-ils faits à l’idée de « défendre l’Europe avec moins d’Amérique ». Mais pas sans elle.
Mendier n’est pas une stratégie prometteuse
On peut objectivement supposer, certes, qu’il est dans l’intérêt stratégique des Etats-Unis de s’engager un minimum dans la sécurité de l’Europe. Compte tenu de la hausse des dépenses européennes de défense et du transfert progressif du « fardeau » vers les Etats européens, l’OTAN constituerait pour les Etats-Unis un instrument sans pareil dans leurs négociations avec leurs alliés européens. Un instrument précieux notamment pour convaincre les Européens de s’aligner sur des politiques-clés aux yeux de Washington, en particulier dans l’Indo-Pacifique.
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