A deux mois de l’élection présidentielle, le gouvernement américain redouble d’efforts pour neutraliser des opérations de désinformation russe sur son territoire. Des opérations bien plus sophistiquées qu’en 2016, richement dotées et remontant jusqu’au Kremlin, selon les documents officiels.
Sanctions, saisie de domaines en ligne, inculpations, mais surtout communication détaillée pour contrer cette entreprise : les autorités américaines ont dessiné, mercredi 4 septembre, les contours de la guerre en ligne largement clandestine qu’aurait déclaré la Russie, pour influer sur les opinions publiques étrangères.
Deux ressortissants russes, Kostiantyn Kalachnikov, 31 ans, et Elena Afanasieva, 27 ans, ont été inculpés à New York pour conspiration en vue de blanchiment et violation de la législation sur les agents étrangers. Selon la justice, qui dispose de leurs communications, ces deux employés de la chaîne RT – instrument de propagande du régime à l’étranger – ont organisé de Moscou, avec des pseudonymes et l’usage de sociétés-écrans, un savant circuit de financement, à hauteur de dix millions de dollars, pour diffuser du contenu aux Etats-Unis.
Ils ont conclu pour cela un accord avec une plate-forme sise dans le Tennessee, qui a reçu des virements réguliers (trente au total, entre octobre 2023 et août 2024), en provenance notamment des Emirats arabes unis et de Turquie.
Se poser en victimes
Selon le résumé du dossier diffusé par le département de la justice, cette société a diffusé près de 2 000 vidéos, à compter de novembre 2023, sur tous les supports disponibles (TikTok, Instagram, X et YouTube). Sur YouTube, elles ont recueilli 16 millions de vues. Ces vidéos concernaient, indique-t-on, de nombreux sujets liés à l’actualité américaine (inflation, immigration) et à la politique étrangère.
« Si les vues exprimées dans ces vidéos ne sont pas uniformes, note le résumé, la plupart s’inscrivent dans les objectifs publiquement formulés par le gouvernement russe et RT – amplifier les divisions internes aux Etats-Unis. » Après l’attaque dans un centre commercial près de Moscou en mars, l’un des deux employés demanda à l’un des fondateurs de la société d’accuser l’Ukraine et les Etats-Unis d’être les responsables.
La société en question, dans le Tennessee, n’est pas nommée dans le document d’inculpation, mais il s’agit de Tenet Media, fondé par Lauren Chen et son époux, Liam Donovan. Tenet Media se présente sur son site comme « un réseau de commentateurs hétérodoxes qui se concentrent sur les questions culturelles et politiques occidentales ». Il a voulu regrouper sous un même toit des vedettes de la droite extrême, tels Tim Pool, présentateur du podcast « The Culture War », ou Benny Johnson, animateur du « Benny Show ».
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