« Les atteintes aux droits des étrangers finissent toujours par toucher les citoyens français »

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En 1984, Bernard Stasi, grande figure française du centrisme, écrivait un livre intitulé L’Immigration : une chance pour la France [Robert Laffont]. Cette époque apparaît de plus en plus révolue. En effet, ces derniers mois, un nombre grandissant de responsables politiques de la droite et du centre s’abîment dans une course à l’échalote xénophobe avec l’extrême droite, au point d’en reprendre, sinon d’en précéder, les propositions.

C’est ainsi que, jeudi 20 février, sera étudiée au Sénat une proposition de loi, portée par Stéphane Demilly, sénateur centriste (Somme), cherchant à faire insérer la disposition suivante dans le code civil : « Le mariage ne peut être contracté par une personne séjournant de manière irrégulière sur le territoire national. »

L’exposé des motifs part d’une situation rencontrée dans la ville d’Hautmont (Nord) − le cas d’un mariage auquel le maire UDI n’a pas pu s’opposer −, pour proposer une interdiction générale posée comme devant éviter des « situations ubuesques » − les rédacteurs n’ont pas cru bon de devoir s’expliquer sur le recours au pluriel.

Une offensive généralisée

Rendue d’autant plus évidente du fait de l’actualité de la procédure judiciaire qui vise Robert Ménard pour avoir refusé de célébrer, à Béziers, un mariage entre une Française et un Algérien en situation irrégulière, la réalité de cette proposition de loi est celle de l’inscription à l’agenda d’une offensive généralisée contre les droits des étrangers. Une offensive à laquelle la droite sénatoriale avait déjà activement participé lors de l’examen du projet de loi concernant l’immigration, porté par Gérald Darmanin, alors ministre de l’intérieur.

Souvenons-nous qu’à cette occasion le Sénat avait adopté, en novembre 2023, une multitude de dispositions plus restrictives les unes que les autres, cherchant ainsi à faire entrer dans le droit positif de nombreuses dispositions, en matière migratoire, du programme du Rassemblement national : remise en question inédite du droit du sol, remplacement de l’aide médicale d’Etat par une aide médicale d’urgence, logique de préférence nationale dans l’attribution des aides sociales… L’Assemblée nationale, sous l’impulsion de l’Elysée et du gouvernement, avait entériné ces graves reculs des droits des étrangers, finalement censurés par le Conseil constitutionnel. Cette censure n’était d’ailleurs pas une surprise. Comme ne le serait pas celle de la proposition de loi de Stéphane Demilly si elle était adoptée par les deux chambres du Parlement.

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