Les arbres, champions de l’autosuffisance et du recyclage à l’automne

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Dans le centre-ville de Bordeaux, en novembre 2018.

Novembre. « Voilà les feuilles sans sève/ Qui tombent sur le gazon,/ Voilà le vent qui s’élève/ Et gémit dans le vallon. » Alphonse de Lamartine (1790-1869) n’avait pas tort : par la force des choses (et des bourrasques), les feuilles arrachées sont privées de sève. Mais peu avant leur chute, elles sont toujours reliées au reste de l’arbre grâce au flux de ce suc précieux, alors même que le processus de leur vieillissement touche à sa fin.

« Chez les animaux, le phénomène de sénescence présente une connotation négative, mais chez les végétaux, c’est un mécanisme de survie et d’adaptation aux stress environnementaux », souligne Céline Masclaux-Daubresse, de l’Inrae à Versailles. Avec ici un maître-mot : le recyclage. A l’automne, les éléments stockés dans les feuilles pendant l’été sont recyclés et exportés par la sève qui descend des frondaisons vers les racines. Ce processus permet aux arbres à feuillage caduc de récupérer une grande partie des nutriments qui seraient sinon perdus lors de la chute des feuilles. « Surtout des minéraux que la plante ne se procure pas facilement, comme l’azote, le phosphore, le soufre ou le fer », ajoute la physiologiste.

Au printemps, les feuilles grandissent. Elles construisent leurs usines photosynthétiques (les chloroplastes) et se gorgent de nutriments jusqu’à leur maturité : du carbone (sucres simples, amidon…) et de l’azote, puisé dans le sol par les racines puis accumulé sous forme de protéines. Ensuite, elles cessent de croître et de stocker des réserves.

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C’est un moment de bascule. Sous l’effet du raccourcissement du jour et de l’arrivée du froid, elles arrêtent peu à peu leur activité de photosynthèse. Et produisent une série d’hormones végétales (éthylène, acide abscissique, acide jasmonique, acide salicylique…), qui contribuent à induire la sénescence foliaire.

Processus d’autophagie

« Mais attention, qui dit déclin ne dit pas débâcle généralisée : l’arbre a encore absolument besoin de ces feuilles tant qu’il n’a pas récupéré une grande part de leur contenu nutritif », explique, en 2019, Gérard Guillot, naturaliste, dans son blog « Zoom nature ». Les arbres, à l’automne, « sont pris dans un dilemme », renchérit Céline Masclaux-Daubresse. Quand et à quelle vitesse programmer la sénescence de leurs feuilles ? Trop tôt, ils raccourcissent leur période de stockage des nutriments. Trop vite, les feuilles meurent avant d’avoir pu rétrocéder leur contenu au reste de l’arbre. Trop tard, la plante s’expose aux risques de survenue d’un stress (gel précoce, sécheresse, tempête…) : les feuilles tomberont sans avoir pu exporter leur contenu.

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