
En 2023, avec plus de 10 000 articles rétractés, c’est-à-dire considérés comme invalides, la littérature scientifique a battu un record. Ce nombre est tout de même à rapporter aux plus de 3 millions de nouvelles publications annuelles. Mais quelles sont les conséquences de ces rétractations ? Une équipe de l’université Paris-Cité et Paul-Sabatier Toulouse-III a voulu le savoir en s’intéressant à un type d’articles ayant une forte utilité sociale, les « revues systématiques ». « Ces articles aident les praticiens à synthétiser les informations contenues dans les plus de 25 000 essais cliniques publiés chaque année, afin par exemple de juger de l’intérêt de tel ou tel traitement », explique Isabelle Boutron, professeure d’épidémiologie à l’université Paris-Cité, responsable de l’étude parue dans JAMA Internal Medicine, le 31 mars.
Ces « revues systématiques » contiennent des « méta-analyses » qui consistent à collecter le plus largement possible des résultats cliniques parus dans la littérature scientifique, puis, statistiquement, de rassembler leurs constats pour en extraire des conclusions, plus solides a priori que celles reposant sur une seule étude. Ces méta-analyses sont effectuées pour chaque « critère de jugement », comme la mortalité, la douleur, la qualité de vie, la réponse immunologique… Et reposent donc sur plusieurs articles publiés.
« En voyant le nombre de rétractations augmenter, et en tombant sur un cas particulier qui s’appuyait beaucoup sur des études retirées, nous avons voulu adopter une approche systématique du phénomène », indique Isabelle Boutron, également directrice du Centre de recherche en épidémiologie et statistiques. Son groupe s’associe à Guillaume Cabanac, professeur à l’université Toulouse-III, spécialiste de la collecte d’informations et de la détection de fraudes. Il est aussi l’auteur d’un logiciel qui scanne quotidiennement les bases de données d’articles et qui identifie les publications citant des articles rétractés. L’équipe a sélectionné 50 revues systématiques comportant 173 méta-analyses reposant sur au moins une étude rétractée. Puis a refait les calculs statistiques, pour 166 d’entre elles, en excluant les articles rétractés afin de mesurer l’effet sur les conclusions.
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