Le Vatican a qualifié, samedi 13 avril, de « grave violation » de la liberté de religion la condamnation par un tribunal français de la communauté des dominicaines du Saint-Esprit et du cardinal canadien Marc Ouellet pour le renvoi « sans motif » de sœur Marie Ferréol.
Le jugement du tribunal civil de Lorient (Morbihan), dont le Saint-Siège dit n’avoir eu connaissance que « par voie de presse », « pourrait avoir donné lieu à une grave violation des droits fondamentaux à la liberté de religion et à la liberté d’association des fidèles catholiques », peut-on lire dans un communiqué diffusé par la salle de presse du Vatican.
Le 3 avril, le tribunal de Lorient a condamné cette communauté religieuse à verser à son ancienne pensionnaire 182 400 euros pour son préjudice matériel et 10 000 euros au titre de son préjudice moral, solidairement avec le cardinal canadien et les « visiteurs apostoliques » du Vatican Jean-Charles Nault et Maylis Desjobert, allés faire des investigations sur place.
Le Saint-Siège explique la sévérité de ses accusations par le fait que le tribunal s’est prononcé « au sujet de la discipline interne et de l’appartenance à un ordre religieux », arguant également que « le cardinal Marc Ouellet n’a jamais reçu de citation à comparaître du tribunal de Lorient ». Il confirme en outre, dans son communiqué, qu’une note verbale concernant cette affaire a été adressée par la secrétairerie d’Etat, l’organe central du gouvernement du Vatican, à l’ambassade de France près le Saint-Siège.
Une exclaustration sans motif
Le Vatican reconnaît toutefois que le cardinal a « effectivement rendu une visite apostolique à la communauté des dominicaines du Saint-Esprit en vertu d’un mandat pontifical » et qu’« à l’issue de cette visite des mesures canoniques ont été prises à l’encontre de Mme Sabine de la Valette [ex-sœur Marie Ferréol], dont son renvoi ».
Sœur Marie Ferréol, 57 ans, avait été renvoyée en octobre 2020 de sa communauté située à Berné, près de Lorient. Une exclaustration sans motif, imposée en pleine nuit, après trente-quatre ans de vie au sein de sa communauté. Elle vivait depuis du seul RSA (revenu de solidarité active).
Au cours du procès, la présidente de la première chambre civile, Armelle Picard, s’était étonnée de ne pas pouvoir avoir accès au dossier d’accusation du Vatican. Bertrand Ollivier, l’avocat des deux « visiteurs apostoliques », avait répliqué qu’il n’y avait « pas droit d’accès au dossier en matière canonique ».
La religieuse vivait sans histoire depuis 1987 dans cette communauté proche des mouvements traditionalistes catholiques. Selon son avocate, à partir de 2011, les choses avaient changé, quand sœur Marie Ferréol avait dénoncé « des dérives et des faits graves ».
D’après le tribunal, aucune preuve n’a été apportée par l’association démontrant que la radiation avait été réalisée dans le respect de ses statuts. Le cardinal Marc Ouellet, qui était préfet du dicastère, organisme administratif assistant le pape, pour les évêques au Vatican à l’époque des faits, a démissionné de ces hautes fonctions en janvier, officiellement « en raison de la limite d’âge », alors qu’il a été accusé d’agression sexuelle au Québec.