le spectre de la guerre longue s’installe

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L’aveu est rare de la part d’un officier de haut rang. Auditionné le 12 juillet par la commission de la défense et des forces armées de l’Assemblée nationale, le général Jacques Langlade de Montgros a mis en garde : la guerre en Ukraine « se prolongera en 2024, voire en 2025 », a expliqué le responsable de la direction française du renseignement militaire, peu optimiste sur le succès de la contre-offensive lancée par Kiev. « Ce conflit est une guerre d’usure s’inscrivant résolument dans le temps long », a assuré le haut gradé, évoquant « deux boxeurs sur un ring s’épuisant coup après coup, sans que l’on sache lequel s’effondrera en premier ».

Un peu plus de deux mois après le lancement par Kiev des premières manœuvres de contre-offensive, militaires comme analystes partagent un même constat : l’armée ukrainienne ne parvient pas, en tout cas pas pour le moment, à franchir l’épais mur de fortifications érigé par les Russes sur quelque 900 kilomètres de front. Volodymyr Zelensky lui-même le reconnaît. « La contre-offensive est difficile, a de nouveau expliqué le président ukrainien lors d’un entretien publié le 7 août par plusieurs médias sud-américains. Les progrès sont probablement plus lents que certains ne le souhaitent ou ne l’imaginaient. »

Depuis les premiers assauts lancés par ses troupes, le 4 juin, l’Ukraine gagne du terrain, mais de façon marginale. En juillet, les soldats de Kiev auraient récupéré 85 kilomètres carrés de leur territoire, après de premiers gains d’environ 200 kilomètres carrés en juin, selon le site War Mapper, qui met quotidiennement à jour des cartes du conflit.

La progression est très lente : depuis la fin du mois de mai, les Russes n’ont perdu que 0,1 % du territoire ukrainien et en occupent toujours plus de 100 000 kilomètres carrés, soit environ 17,5 % du pays. Les Ukrainiens ont bien revendiqué, mercredi 16 août, la prise d’Urozhaine, sur la ligne de front Sud, mais il s’agit d’un village, qui comptait 1 000 habitants avant l’invasion de février 2022.

« Pays le plus miné au monde »

Cette progression plus modeste qu’espéré s’explique par plusieurs facteurs. Le premier tient à la préparation des Russes. A la différence des contre-offensives menées avec succès à l’automne 2022 dans les régions de Kharkiv et de Kherson, les forces de Moscou ont eu, cette fois, le temps de se préparer aux assauts ukrainiens. D’immenses lignes de fortifications ont été érigées, notamment dans le sud du pays. Sur environ trente kilomètres de profondeur, on y trouve aujourd’hui des milliers de tranchées, des bunkers, des dents de dragon, etc. « La Russie a conçu l’un des plus grands systèmes défensifs d’Europe depuis la seconde guerre mondiale », estime le cercle de réflexion américain Center for Strategic and International Studies, dans un rapport publié le 9 juin.

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