« Le soft power des pays du Golfe est du “hard power” fondé sur des relations de clientélisme »

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L’émir du Qatar, Tamim Ben Hamad Al Thani, et le président de la FIFA, Gianni Infantino, lors du match d’ouverture de la Coupe du monde de football à Al-Khor, au Qatar, le 20 novembre 2022.

Alexandre Kazerouni, maître de conférences à l’Ecole normale supérieure, a publié Le Miroir des cheikhs. Musée et politique dans les principautés du golfe persique (PUF, 2017).

Comment se caractérise le soft power des pays du Golfe ?

Le concept de soft power, forgé par [le théoricien des relations internationales américain] Joseph Nye pour décrire une victoire idéologique sans contrainte physique et sans distribution d’argent, est devenu un concept fourre-tout. Les projets artistiques, sportifs ou éducatifs placés sous cette bannière par ces Etats n’en sont pas. Ce sont des plateformes de distribution d’argent constituées par les familles régnantes au bénéfice de prestataires de services, originaires pour l’essentiel de trois pays : la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Le soft power des pays du Golfe est du « hard power » économique fondé sur des relations de clientélisme.

Pourquoi ces trois pays ?

Avant tout pour des raisons défensives. Les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France ont en commun une capacité militaire, la bombe atomique et un siège au Conseil de sécurité de l’ONU [Organisation des Nations unies]. Depuis les années 1950, l’environnement immédiat des monarchies du Golfe a été marqué par des coups d’Etat militaires en Egypte et en Irak, sans qu’ils fassent le choix de développer leurs propres forces armées. Ils ont préféré déléguer leur défense à ces trois puissances étrangères, surtout après la guerre du Golfe de 1991, où leur coalition a permis de chasser les troupes irakiennes du Koweït. Depuis, les achats d’armes ont explosé et leurs bases militaires se sont multipliées sur la rive sud du golfe Persique. Le clientélisme actuel se conjugue avec ce mercenariat.

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