Le Sénat renonce à réformer l’impôt sur les successions

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Le président du Sénat, Gérard Larcher, au Sénat, le 6 novembre 2024.

Ce ne sera pas pour cette année. Une fois de plus. Malgré une multitude de rapports, de propositions de réforme et d’amendements parlementaires, la France ne touchera pas dans l’immédiat à l’impôt sur les successions. Ou seulement à la marge. Les projets encore sur la table ont été écartés, vendredi 29 novembre, lors de l’examen par le Sénat du projet de budget pour 2025. Ils n’ont presque aucune chance de resurgir dans le cadre de la commission mixte paritaire attendue le 16 décembre. Seule a survécu au tri sénatorial une poignée d’amendements allégeant la fiscalité sur les héritages quand ceux-ci concernent une exploitation agricole, servent à acheter ou à rénover une résidence principale, ou bénéficiant aux enfants d’une famille monoparentale.

« A chaque fois qu’il y a une velléité d’effectuer de vrais changements dans ce domaine, c’est abandonné, constate Claire Fournier, journaliste et autrice de l’essai Repenser l’héritage (L’Observatoire, 2022). Souvenez-vous des premiers propos d’Emmanuel Macron contre la rente et pour la taxation des successions, en 2016, avant sa première élection. Une fois arrivé au pouvoir, il a mesuré l’hostilité des Français, et rien n’a bougé. »

Le scénario s’est renouvelé cette année. En amont, plusieurs rapports ont nourri la réflexion, émanant de la Cour des comptes, de l’ONG Oxfam ou encore, mercredi 27 novembre, du cercle de réflexion Hémisphère gauche, associé à la fondation Jean Jaurès. Tous paraissent assez convergents : il y a matière à une réforme en profondeur de l’impôt sur les successions. En 1791, la Révolution française avait adopté la première loi taxant les héritages, au nom des idéaux d’égalité et de fraternité. Mais, plus de deux siècles après, « l’impôt sur les successions ne joue pas le rôle qu’il pourrait dans l’amélioration de l’égalité des chances », relevaient les économistes Olivier Blanchard et Jean Tirole, dans leur rapport intitulé « Les grands défis économiques », qu’ils avaient remis au chef de l’Etat en 2021.

« Dispositifs d’exonération »

Malgré cet impôt, les inégalités se sont en effet creusées ces dernières décennies. Entre 1998 et 2021, le patrimoine moyen des 10 % de Français les plus pauvres a chuté de 54 % en euros constants, selon l’Insee. Celui des 10 % les mieux dotés a bondi de 94 % dans le même temps. Les pauvres sont ainsi devenus encore plus pauvres, et les riches beaucoup plus riches, grâce à la double hausse des prix de l’immobilier et de la Bourse, qui a accru d’autant la valeur de leurs possessions.

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